Dans une enquête dédiée aux délais de paiement auprès des entreprises marocaines, Coface dresse un tableau plutôt sombre sur les retards de paiement. 28% des entreprises interrogées déclarent un ratio d’impayés supérieur à 10%.

Ce n’est pas une surprise. Les entreprises marocaines en font l’expérience chaque jour. ces mêmes entreprises sont parfois coupables et victimes à la fois : elles sont mauvaises payeuses. Un constat que confirme coface par une enquête sur les délais de paiement des entreprises reposant sur un échantillon de 307 entreprises marocaines volontaires. Les résultats confortent le ressenti général de l’allongement des délais et des retards de paiement. Cette enquête fait également ressortir de nouvelles corrélations intéressantes à analyser, tel l’impact sur l’embauche, l’investissement ou encore la trésorerie. Aussi, 91% des entreprises questionnées par coface accordent des délais de paiement à leurs clients. Parmi elles, 41% considèrent le fait d’accorder des délais de paiement comme une contrainte inhérente au business. Elles déclarent consentir des crédits à leur client pour la simple raison que «c’est une condition imposée par ce dernier», alors que 35% d’entre eux expliquent simplement que«c’estlapratique». Cecidit, cetaspectde culture du délai de paiement ne représente pas en soi une menace pour les entreprises. le problème vient plutôt de l’allongement de ces délais, et surtout, des retards de paiements sur des factures «stratégiques» qui peuvent mettre en difficultés certains fournisseurs, et mettre en jeu leur survie.

30 à 60 jours, la norme

Au Maroc, selon cette enquête, la tranche de délai de paiement la plus fréquente est celle comprise entre 30 et 60 jours, ce qui représente un délai moyen raisonnable et dans les «normes» internationales. «La part des entreprises qui affirment accorder un délai de paiement moyen compris entre 30 et 60 jours est égale à 39%, tandis que celles qui accordent un délai compris entre 60 et 90 jours représentent 25% des répondants. Enfin, seulement 10% des entreprises accordent un délai de paiement moyen supérieur à 120 jours», nous livre Sofia tozy, économiste en charge de la région Mena chez coface et co-auteure de l’enquête. Il reste ainsi 35% des entreprises qui «souffrent» d’un délai de paiement dépassant les 60 jours. Mais globalement, les ratios marocains restent comparables aux niveaux enregistrés dans des économies avancées. «Les délais de paiement au Maroc sont dans la moyenne de ceux observés en europe. En effet, l’indice de paiement européen (european Payment index, ePi) situe le délai moyen de paiement des entreprises européennes à 49 jours», soulignent les auteurs. En France, ce délais moyen passe même à 55 jours, et s’envole jusqu’à 85 jours en espagne et même 96 jours en italie. Le tableau général dressé par coface n’est ainsi finalement pas si alarmiste que ça.

les impayés son légion

Pourtant, lorsque l’on se penche sur le ratio d’impayés,lasituationestencoreplussombre.«en ce qui concerne les ratios d’impayés, ils semblent relativement importants au Maroc puisque 28% des entreprises interrogées déclarent un ratio d’impayés supérieur à 10%», souligne l’enquête. Cette dernière recense également les secteurs les plus exposés. en tête des entreprises qui souffrent le plus de ce fléau, l’on retrouve celles du bâtiment et des travaux publics, des nouvelles technologies, et des services aux entreprises. Une situation qui non seulement menace la santé financière des entreprises touchées, mais aussi leurs contribution à la création d’emploi. Côté trésorerie, l’enquête relève que 80% des entreprises de l’échantillon perçoivent une baisse de trésorerie lorsque les retards de paiement augmentent. En revanche, aucun lien direct n’a été établi entre les retards de paiement et la décision d’investissement. «Contrairement aux conclusions d’autres études, la question des retards de paiement semble être un déterminant secondaire dans la décision d’investir au Maroc», explique cette économiste. En revanche, l’effet est nettement ressenti quant à la création d’emploi. En effet, selon l’enquête, la relation est vérifiée entre la décision d’embaucher et les retards de paiement. «Plus les retards de paiement diminuent, plus les effectifs des entreprises auront tendance à se stabiliser, voire à augmenter», conclut l’enquête. en europe, 40% des chefs d’entreprise déclarent que les retards de paiement les dissuadent d’embaucher, alors que 25% affirment qu’ils les conduisent même à des licenciements. l’impact peut ainsi être direct sur la variable emploi. Enfin, même si les retards de paiement ont un aspect systémique, les effets se propageant d’une entreprise à l’autre, l’on n’arrive toujours pas, selon coface à chiffrer l’impact de cette variable sur des indicateurs macroéconomiques et sectoriels plus globaux. Ce qui est sûr, c’est que des milliers d’affaires ont péri et des milliers d’emplois se sont évaporés à cause de cette tare qui a encore la peau dure.

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