Le Ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’investissement et de l’Economie Numérique, Moulay Hafid EL ALAMY a annoncé le 27 Juin devant Sa Majesté le Roi Mohamed VI les grandes lignes du plan « Maroc Digital2020 », en continuité de « Maroc Numeric 2013 ». Il faut reconnaitre que c’est tout de même un nouveau virage  qui en dit long sur l’échec de « Maroc Numeric 2013 » ?

 Je ne parlerai pas d’échec car Maroc Numeric 2013 a eu le mérite d’exister et c’est une stratégie qui est venue à son époque, mettre le Maroc sur les rails de l’Economie Numérique. Les chantiers qui composaient cette stratégie étaient peut-être un peu trop ambitieux et pas forcément dotés des outils de financements et des structures de gouvernance adéquats. Il s’agit en effet d’un nouveau virage que les professionnels sont obligés de prendre car les enjeux du secteur de l’IT sont grands et force est de constater que malgré quelques avancées, notre pays accumule des retards croissants sur l’ensemble des dimensions. La Turquie affiche par exemple 1,7% du budget de l’Etat dans l’IT, 2,7% de dépenses privées, 11 ingénieurs pour 10.000 habitants et surtout plus de 15 entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 100 millions d’euros et qui font effet locomotive sur le tissu des acteurs IT, contre respectivement 0,8%, 1,4%, 3 et malheureusement aucune entreprise de l’IT ne dépassant 1 millions d’euros de CA.

Le challenge est donc bien réel et nous devons nous doter de tous les atouts (et chantiers) pour améliorer le positionnement de notre pays dans le network readiness index (composite de 11 indicateurs talents, infrastructures, accès, utilisation…) en faisant confiance aux entreprises marocaines du secteur qui ont un réel savoir-faire à faire valoir.

En quoi exactement la nouvelle stratégie Maroc Digital 2020 est-elle différente de l’ancienne ?

Et bien justement, ayant répertorié nos défaillances, la nouvelle stratégie dégage six  axes visant à combler nos retards :

  • Ancrage de façon irréversible dans la révolution digitale, principal moteur des pays en forte émergence – C’est une politique globale à mener à très haut niveau et dans tous les secteurs avec pour objectif de palier à l’insuffisance des ressources humaines , à améliorer les infrastructures télécoms et à encourager la réforme de l’Administration et des entreprises.
  • Outil de transformation économique et social comprenant la réforme de l’Administration afin qu’elle numérise ses relations avec les citoyens, avec les entreprises et sa gestion et ses procédures internes. La réforme de l’Administration sera probablement le catalyseur de la réduction de la fracture numérique et de la modernisation et la compétitivité des entreprises
  • Logique de focalisation très forte en ciblant des projets dans l’ensemble des départements ministériels à impact transformationnel réel.
  • Positionnement de hub régional du Maroc vers l’Afrique
  • Développement du tissu d’acteurs par renforcement de la place numérique en favorisant l’émergence de locomotives sectorielles et le dynamisme des start-up.

Et enfin création d’une agence  dédiée au développement des services publics numériques.

Cette vision permettra, donc, de faire entrer le Maroc dans le monde du digital, et ce à travers plusieurs piliers, à savoir la dématérialisation, la transparence de l’information, la recherche et la transformation numérique de la PME-PMI qui au lieu d’investir dans le matériel informatique optera, éventuellement, pour des solutions cloud beaucoup plus viables.

L’APEBI a été et est un partenaire actif du ministère de tutelle en ce qui concerne l’élaboration de cette nouvelle stratégie.  Notre fédération  réitère son engagement ainsi que sa disponibilité totale  dans la mise en œuvre de cette nouvelle stratégie.

Pour en revenir à l’agence, quelle sera sa mission ?

L’un des principaux facteurs différenciateurs de Maroc Digital 2020 réside dans la création d’une instance de gouvernance indépendante en vue de se charger de l’application de Maroc Digital. Ceci s’est donc traduit par l’annonce de la création de l’Agence nationale pour le développement numérique qui jouera un rôle déterminant dans le déploiement de la stratégie, pour la simple raison que le digital touche l’ensemble des secteurs. Il était temps de créer une instance qui assurera plus d’homogénéité et plus de transparence. Sa mission principale sera tout d’abord de mettre en œuvre la stratégie en coordonnant et fluidifier le déroulement des projets. En effet, les prérogatives de l’agence doivent être soigneusement délimitées pour en garder l’essence d’une entité chargée de veiller sur la gouvernance des projets informatiques remontés par les différentes entités de l’Etat, promouvoir le savoir-faire IT marocain et rendre plus fluide le déroulement des projets.

Nous nous réjouissons de l’annonce de création de cette entité qui est la concrétisation d’une longue attente exprimée depuis longtemps par les professionnels. Dans le cadre des ‘’Propositions APEBI pour l’Economie Numérique’’ nous avons très tôt prôné la nécessité de l’existence d’une instance de gouvernance autonome et dotée de moyens financiers suffisants pour garantir le déploiement des différents projets inclus dans la stratégie Maroc Digital 2020.
Nos attentes vis-à-vis de cette nouvelle instance sont nombreuses car en plus de l’élaboration et la réalisation des services numériques adressés aux citoyens et aux entreprises, il s’agira pour ces instances, d’assurer rapidement le suivi et la pérennité des projets lancés. Ainsi, les professionnels auront un interlocuteur indépendant et neutre chargé de recevoir leurs doléances et leurs attentes avec les preneurs de décisions publics.  L’agence aura un avis consultatif obligatoire que tout ministère devra consulter avant de lancer un quelconque projet qui aura un impact sur les populations. Elle aura également à proposer des textes de loi pour faire avancer le secteur.

Etes-vous optimiste quant aux réalisations des objectifs de 30% d’ici 2020, si l’on regarde la mauvaise expérience de « Maroc Numeric 2013 »?

Un objectif doit par essence être ambitieux, atteignable, mesurable mais ambitieux. Car ce n’est qu’ainsi que nous déploierons le meilleur de nous-mêmes et nous nous devons d’avoir des objectifs élevés pour tirer les secteur de l’IT (avec toutes ses composantes) vers le haut.

A titre d’exemple, à l’horizon indiqué plus de 50% des démarches administratives devront être traitées en ligne, 20% des PME équipées et connectées à internet, renouer avec un taux de croissance annuel de 5 à 10% pour l’offshoring et positionner notre pays en pole position de hubs numériques en Afrique.

Personnellement, je crois en l’implication, l’abnégation et le travail acharné des équipes du Ministère et nous serons, nous secteur privé, à leurs côtés pour elever les défis qui nous attendent. Ces défis sont nombreux car nous ne sommes pas seuls et nous devrons faire front commun pour les atteindre.

L’Apebi organise également le salon AITEX- AFRICA IT EXPO  du 21 au 24 Septembre 2016 à l’OFEC.  Un évènement tourné complètement sur l’Afrique?

Cette 1ère édition du salon AITEX – AFRICA IT EXPO est organisée pour d’abord fédérer les acteurs nationaux, développer le business du secteur en lui offrant la possibilité de montrer son expertise et savoir-faire et d’être au diapason des derniers progrès et de s’ouvrir d’avantage à l’international…plus particulièrement vers l’Afrique.

Inscrit sous le thème« La transformation digitale, levier de développement en Afrique », le salon AITEX s’inscrit dans une logique d’intégration régionale. L’objectif est de favoriser les synergies et l’échange des « best practices » avec les confrères et homologues des autres pays africains, et de réussir une émergence transversale et soutenue du continent à l’horizon 2020. L’Afrique est primordiale et nous avons tenu à inscrire leSénégal et la Côte d’Ivoire en pays d’honneur pour la 1ère édition de l’AITEX. Toujours dans un esprit de collaboration privé, l’Apebi réservera aussi un espace dédié pour la promotion et la vulgarisation des travaux de l’ADEN pour offrir une belle tribune au plan « Maroc Digital 2020 » et proposer, dans le cadre d’une approche participative un cadre privilégié d’information, d’expression, de débats et d’échanges sur les contours et points essentiels du plan « Maroc Digital 2020 ».
Je tiens aussi à remercier le gage de confiance que viennent de nous témoigner les plus hautes instance du Royaume en nous donnant le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi pour la 1ère Edition de l’AITEX. Ce n’est que plus de responsabilité et nous en serons à la hauteur.

Pourquoi justement le Sénégal et la Côte d’Ivoire ?

L’Afrique est primordiale et nous avons tenu à inscrire le Sénégal et la Côte d’Ivoire en pays d’honneur pour la 1ère édition de l’AITEX. Tout d’abord des groupes d’impulsion économique existent avec les deux pays suite aux différentes missions de Sa Majesté le Roi, aussi plusieurs entreprises du secteur (dont Gfi Maroc que je préside) sont très actives sur ces 2 pays et il faut aussi reconnaitre que le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont en avance sur certains chantiers IT et nous apprendrons mutuellement de nos expériences lors de l’AITEX.

Que faut-il au Maroc pour devenir un vrai hub dans le domaine des Tic pour l’Afrique ?

De la visibilité, des success stories et de la promotion…

Notre pays a été fortement visible sur le radar mondial de l’IT mais nous nous sommes quelque peu reposés sur nos lauriers. Il est temps maintenant de revoir, reformuler et promouvoir les atouts de notre pays (en soft skills, infrastructures, bassin d’emploi, incentives fiscaux..). A ce titre la récente annonce de création de l’AMDIE sera un atout de taille car œuvrera à consolider la coordination des opérations et de rationaliser les ressources en matière de promotion des exportations marocaines et d’attraction d’investissements directs étrangers.

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