Le Maroc accélère sa transformation industrielle avec 2 500 hectares de zones actuellement en aménagement, révèle M. Akram Allaoui. Directeur des Zones Industrielles au Ministère de l’Industrie et du Commerce Un chiffre spectaculaire qui s’ajoute aux 29 zones industrielles déjà réhabilitées depuis 2010. Entre dépollution massive, fonds dédiés et digitalisation, découvrez comment le Royaume prépare son avenir industriel.

Quelles sont les principales stratégies adoptées par le Ministère pour garantir la durabilité environnementale des zones industrielles au Maroc ?

Le Ministère de l’Industrie et du Commerce accorde une attention toute particulière à la durabilité environnementale de l’industrie nationale et œuvre, en collaboration avec ses partenaires au niveau central et territorial, pour intégrer cette dimension dans la conception et la mise en place de nouvelles Zones Industrielles (ZI). Pour les zones industrielles d’anciennes générations, le Ministère a accompagné la réalisation de plusieurs projets de dépollution industrielle et de stations de traitement des eaux usées (STEP) au niveau de ces zones.  Ce chantier d’envergure a nécessité un investissement de plus d’un milliard de dirhams dont la contribution du Ministère s’élève à 450 millions de dirhams. Je pourrais citer à titre d’exemple les projets de dépollution des zones industrielles de Skhirat et Ain Atiq, la dépollution industrielle dans le Bassin du Sebou, ainsi que la Réalisation de STEP au niveau des parcs industriels d’Ain Cheggag et de Nouaceur à Casablanca. Par ailleurs, le Ministère a mis en place, dans le cadre d’un partenariat conclu entre le Gouvernement du Royaume du Maroc et le Gouvernement des Etats-Unis d’Amérique, un fond de développement des zones industrielles durables (FONZID) qui vise l’appui de projets de création ou de requalification d’espaces d’accueil industriels qui ont une composante dédiée à l’amélioration de la gouvernance et de la durabilité économique, sociale et environnementale. La première édition du FONZID a permis la sélection de neufs projets portant sur la création/développement de cinq parcs industriels et la requalification/réhabilitation de quatre projets existants.

La deuxième édition du FONZID d’une enveloppe de 150 MDH apportera aux projets sélectionnés, un appui technique et un appui financier pouvant atteindre 50% du budget du projet dans la limite de 30 millions de DH pour les projets de création de ZI et de 20 millions de DH pour les projets de réhabilitation.

Comment évaluez-vous le niveau actuel des infrastructures dans les zones industrielles marocaines ?

Le Royaume a mis en place des projets de parcs industriels de nouvelles génération spécialisée dans plusieurs domaines tels que l’automobile, l’aéronautique, l’agro-alimentaire, ou encore l’Offshoring. Ces plateformes offrent une qualité d’infrastructures, aux standards internationaux, qui répond aux besoins et attentes des investisseurs et qui accompagnent la montée en puissance de l’industrie nationale Les zones industrielles et les zones d’accélération industrielles nouvellement crées disposent d’un organisme de gestion opérationnel qui assure une gestion et une maintenance optimale de la zone. Certaines zones plus anciennes ou périphériques font l’objet de réhabilitation pour améliorer leur attractivité. À ce sujet et depuis 2010, le Ministère a accompagné 29 projets de réhabilitation et de mise à niveau de ZI sur une superficie de 1481 ha en apportant une contribution financière de 860 MDH.

Afin de permettre aux investisseurs industriels marocains et internationaux d’accéder aux informations liées aux disponibilités du foncier industriel, nous avons mis en place, en partenariat avec l’Agence MCA-Morocco, l’ONUDI et l’ensemble des aménageurs/gestionnaires de zones industrielles, une plateforme électronique sur le foncier industriel (localisation, superficie, prix, distance par rapport à l’infrastructure à proximité, modalités d’acquisition, de location et d’installation, structure de gestion…). Par ailleurs, il convient également de citer la mise en place des plateformes électroniques des Centres Régionaux d’investissement pour la digitalisation des démarches administratives liées aux projets d’investissement notamment les projets industriels souhaitant s’établir au niveau des ZI. En effet, le site «www.cri-invest.ma» permet de simplifier les procédures et de faciliter les échanges entre les administrations et les investisseurs.

Dans le contexte de la quatrième révolution industrielle, quelles sont les mesures prises pour encourager l’adoption de technologies avancées, comme l’intelligence artificielle et l’Internet des objets dans les zones industrielles ?

Nous sommes parfaitement conscients de l’importance de la transformation numérique pour le développement de l’industrie nationale. C’est un véritable tournant qui exige le développement d’un écosystème d’innovation dynamique, des infrastructures numériques solides et des compétences efficaces. Les principaux secteurs où nous encourageons l’adoption de nouvelles technologies sont ceux qui ont un impact significatif sur l’économie nationale et qui offrent des opportunités de croissance, notamment l’automobile, l’aéronautique ou les énergies renouvelables. C’est là où les technologies de pointe de l’industrie 4.0 seront déployées pour monter en compétence et gagner en compétitivité. Nos entreprises ont plus que jamais besoin d’innover, de se réinventer et de s’adapter aux exigences de l’ère du numérique. Je voudrais mentionner pour ce point le programme de soutien à l’innovation industrielle, financé par le Fonds de soutien à l’innovation, lancé par le ministère en collaboration avec la CGEM. Ce programme vise à soutenir les projets industriels et les domaines technologiques liés à l’industrie, en particulier ceux qui sont orientés vers les métiers d’avenir. Nous misons fortement sur les talents de nos jeunes et sur le développement de la R&D et de l’ingénierie à travers l’attraction de nouveaux centres d’ingénierie et le développement de programmes collaboratifs avec les universités, notamment sur la production durable et l’industrie 4.0. Le Ministère veille en ce sens à construire un écosystème performant d’innovation incluant les entreprises innovantes, les porteurs de projets, les universités, les centres techniques et les Technoparks.

Quels programmes ou initiatives ont été mis en place pour aligner les compétences locales sur les besoins du marché du travail dans ces zones ?

L’adéquation entre les ressources humaines et le marché du travail est l’un des facteurs clés de la compétitivité de notre industrie. Nous avons veillé, en étroite collaboration avec nos différents partenaires, à mettre en place un dispositif de formation innovant favorisant l’adéquation entre l’offre et la demande afin de répondre au mieux aux besoins des investisseurs et permettre à l’industrie nationale de gagner en compétitivité et en attractivité. Pour se faire, le secteur privé participe activement à la conception et à la mise en œuvre de programmes de formation spécialisés adaptés aux besoins de compétences et d’aptitudes de chaque secteur.

De leur côté, les instituts professionnels tels que l’IFMIA, l’IMA et l’ISMALA encouragent la participation des acteurs de l’industrie à la gestion des aspects éducatifs et techniques en utilisant des méthodes d’apprentissage alternatives pour combiner l’étude théorique avec l’expérience pratique, et en coopérant avec les entreprises industrielles pour augmenter leurs taux d’emploi, créant ainsi de nouvelles opportunités d’emploi.

Comment le Ministère s’assure-t-il que les communautés locales bénéficient des zones industrielles ?

Le Maroc a développé une offre de foncier industriel diversifiée, couvrant l’ensemble des régions du Royaume afin de répondre aux besoins des investisseurs nationaux et internationaux. Aussi, et dans son effort de consacrer le principe d’équité territoriale, le Ministère, en partenariat avec les acteurs locaux, accompagne la réalisation des projets de zones industrielles ou de zones d’activités économiques couvrant l’ensemble des préfectures et provinces, et ce, conformément aux engagements du Ministère. L’objectif est de créer une offre foncière pour encourager l’investissement et créer une dynamique économique bénéficiant aux communautés locales notamment en termes de création d’emplois.

Quels sont les principaux défis auxquels fait face le développement des zones industrielles au Maroc ?

Notre pays a su mettre en place une dynamique industrielle sans précédent qui attire de plus en plus d’investissements. Dans cette marche vers l’excellence et la prospérité, nous œuvrons d’arrache pieds, en concertation avec nos partenaires pour faire face aux différents défis auxquels fait face l’industrie nationale. L’un des principaux enjeux est de de répondre à la demande croissante de terrains industriels dans la plupart des régions du royaume, qui s’accompagne des défis liés principalement aux coût de réalisation du projet notamment les travaux d’aménagement hors site et/ou le coût élevé de l’acquisition de terrains dans certaines régions. Pour surmonter ces contraintes, nous collaborons avec différents partenaires pour réaliser les projets d’infrastructures industrielles, notamment dans le cadre des Plans de Développement Régionaux. Nous apportons également un appui technique et financier pour la réalisation des projets, dans la mesure du possible, et préconisons la réalisation de projets de zones industrielles sur des sites facilement connectables aux différents réseaux (alimentation électrique, réseau routier, etc.) et à des prix raisonnables.

Un autre défi majeur réside dans la durée de réalisation et de valorisation des projets de ZI. Ce processus implique plusieurs étapes, telles que le choix du site, la réalisation des études techniques et financières, l’apurement du foncier, la réalisation des travaux d’aménagement hors et in site, cession des parcelles, commercialisation et la construction et équipement des unités industrielles, pour aboutir finalement à la valorisation des projets industriels. À cet égard, nous mobilisons l’ensemble de nos partenaires, notamment les Départements ministériels, aménageurs développeurs et autorités locales pour diligenter la mise en œuvre des actions nécessaires afin d’assurer la réalisation du projet dans les meilleures conditions et conformément au planning. Et afin d’accompagner l’aménagement, la commercialisation, la valorisation et la gestion des ZIs, le Gouvernement s’est attelé à la mise en place d’un cadre législatif et règlementaire à travers la publication de la loi 102-21 relative aux zones industrielles. Cette loi prévoit notamment l’adoption de règlements généraux relatifs à l’aménagement, la commercialisation et la gestion des zones industrielles qui définissent les standards d’aménagement et précisent les meilleures pratiques dans le domaine de la gestion des zones industrielles. Cette loi prévoit également une procédure pour la récupération des lots ou locaux industriels non valorisés.

Quelle est la vision stratégique du Ministère de l’Industrie et du Commerce pour le développement des zones industrielles au Maroc et quels sont les objectifs à atteindre à moyen et long terme ?

La vision stratégique du Ministère est claire ! Faire du Maroc une destination industrielle de référence, dotée des zones industrielles avec des infrastructures modernes, compétitives et capables d’attirer des investissements massifs, de dynamiser l’économie régionale et de créer de richesse et emplois. Le foncier industriel est érigé au premier rang des priorités de la politique industrielle, avec des objectifs clairs et des chiffres précis. Son impact est important en termes de promotion des investissements industriels, nationaux et internationaux, de réduction des disparités territoriales, d’amélioration de la compétitivité, ainsi que de renforcement de l’attractivité des régions. Dans ce cadre, le Ministère a prévu, en collaboration avec ses partenaires, plusieurs initiatives pour favoriser le développement des infrastructures industrielles. Il s’agit notamment de la création de nouveaux parcs et zones industrielles, en incitant le secteur privé à s’impliquer davantage, de l’aménagement des zones d’activités économiques adaptées aux unités de petite et moyenne taille, ainsi que de la réhabilitation des zones industrielles existantes afin de les mettre à niveau.

L’État soutient ces projets en offrant des terrains à des prix attractifs, en contribuant au financement des infrastructures essentielles, en particulier l’énergie, l’eau et l’assainissement, et en facilitant les démarches administratives pour les investisseurs. À court et à moyen terme, le Ministère œuvre à accompagner les différents projets qui sont en cours d’aménagement ou en cours d’étude pour qu’ils soient finalisés dans les meilleurs délais. Actuellement, nous avons environ 2 500 ha en cours d’aménagement et plus de 3 880 ha de nouveaux projets qui vont être lancés dans les prochaines années. L’accompagnement de l’État se décline également à travers le Fonds des Zones Industrielles Durables (FONZID) dont la troisième édition sera lancée courant 2025 pour inciter les porteurs de projets de zone industrielle à concrétiser leurs projets, notamment les partenaires privés qui sont invités à participer en force à cette édition.

Comment le Maroc peut-il s’inspirer des expériences internationales réussies pour renforcer sa position en tant que destination industrielle de premier plan ?

Bien évidemment, nous nous inspirons des meilleures pratiques internationales pour renforcer l’offre du foncier industriel et améliorer la qualité de nos infrastructures pour un positionnement du Maroc en tant que destination industrielle de premier plan. À cet effet, le Maroc a noué plusieurs partenariats stratégiques, notamment avec les Etats-Unis dans le cadre de l’accord de coopération «Compact II», signé en 2016, à travers le Millinium Challange Coorporation. Ce programme, qui a été clôturé en 2023, a permis de mettre en place une nouvelle approche en matière de planification, de développement, de revitalisation et de gestion des infrastructures industrielles, privilégiant le partenariat public privé (PPP) et l’amélioration des performances environnementales, sociales et de genre. Dans ce cadre, nous avons lancé plusieurs initiatives, parmi lesquelles la réalisation de Projets Pilotes de zone industrielles avec des partenaires privés et la mise en place du FONZID (Fonds de Développement des Zones industrielles Durables). Aussi, un programme de partenariat a été signé avec l’ONUDI (l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel) visant la mise en œuvre de l’assistance technique. Ce partenariat porte principalement sur le développement et la mise en place d’un programme de renforcement des capacités en matière du foncier industriel au profit des parties prenantes, la mise en place d’une plateforme électronique sur le foncier industriel et le diagnostic et analyse détaillée des zones industrielles existantes.

Propos recueillis par Rachid Mahmoudi

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