La deuxième table ronde d’Industry Meeting Day s’est intéressé à la place de la R&D dans les organisations, en mettant en relief les expériences de chacune des structures présentes en matière d’innovation.

À cette occasion, la discussion a porté sur son aspect « marché » en essayant de répondre à la problématique des chercheurs d’une part, qui restent isolés du monde entrepreneurial, et des industriels d’autre part, qui ont un besoin imminent en innovation. Il en ressort également qu’au Maroc ce ne sont pas les chercheurs qui manquent, l’impératif reste l’accompagnement public-privé mais aussi un changement de mentalité dans le sens où il faut croire en la capacité marocaine à créer et faire confiance au produit national.

Adil El Maliki , Directeur Général de l’Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC)

« Pour répondre à la question de savoir si le Maroc est innovant, je dirais que l’innovation se mesure quantitativement. Il existe des index de mesure dans ce sens, tel que le « Global Innovation Index », qui est reconnu au niveau international et qui
mesure la capacité actuelle et future des pays en matière d’innovation, et dans
lequel le Maroc est en train d’engranger des points.
Par ailleurs, nous sommes 125e en « Business Sophistication », ce qui veut dire que les gens au Maroc sont surqualifiés par rapport aux métiers qu’ils exercent. Pour arriver à une solution à ce problème, je pense qu’il faut créer plus de liens formels entre l’entreprise et l’université, un contrat où chacun stipule ses droits et ses devoirs.
Autre mesure importante que nous avons mis en place au sein de l’Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC), consiste en un système permettant aux brevets marocains d’être conformes aux standards internationaux et pour
exemple, comme vous avez pu le voir récemment, pour la première fois un inventeur marocain a participé aux prix européens de l’innovation.
Pour ce qui est de l’amélioration de la qualité des brevets, parmi les critères de
brevetabilité examinés, nous constatons que de plus en plus de brevets marocains
répondent à ces critères : au niveau international 1 brevet sur 2, soit 50% sont délivrés et au Maroc nous sommes à 38% de brevets délivrés, ce qui marque une progression même si, ceci dit, le Maroc rejette plusieurs brevets.
S’agissant du stock des brevets en vigueur au Maroc, nous en sommes à 5.000 brevets : 4.000 sont détenus par des personnes physiques et uniquement
355 sont détenus par les entreprises. Les universités ont fait un formidable effort
et détiennent 700 brevets.

Au Maroc comme dans le monde on associe la recherche et développement avec l’innovation, le défi majeur c’est le financement, et puis la réponse de la RDI aux attentes du milieu socioéconomique.
Pour le cas du Maroc, comme les ressources sont limitées, on ne peut pas faire de la recherche fondamentale dont le but principal est la création de la connaissance et du savoir, mais une orientation vers la recherche appliquée est plus que primordiale avec son rôle de capitalisation et de valorisation du savoir et non sa création.
De même pour l’innovation: le Maroc est sensé travailler sur les deux concepts de l’innovation, à savoir l’innovation contrôlée et l’innovation ouverte, cette dernière présente une vraie opportunité pour notre pays afin de gagner nos années de retard dans ce domaine.
L’Université internationale de Rabat se place en tant que leader Africain et National « Base donnée ORBIT » dans le domaine de l’innovation technologique avec plus de 230 brevets à son actif.
Elle réalise des activités de recherche développement et d’innovation,
notamment dans les domaines de l’ingénierie, des énergies renouvelables, des technologies de l’information et de la communication (TIC), du transport et de la mobilité électrique. Pour ancrer ses activités d’innovation, l’UIR a mis
en place son TT O (Technology Transfer Office) afin de commercialiser ces innovations et la production scientifique en général.
Pour continuer lors efforts mutuels l’Université internationale de Rabat et l’Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC) viennent de signer un Mémorandum d’entente pour joindre leurs efforts dans la mise en place d’une politique
de propriété intellectuelle aux normes. »

Omar Benaicha, Directeur Marketing & Sales Afrique du Groupe Bureau Veritas

« Nous disposons au Maroc de très bons chercheurs mais le problème c’est comment mettre ces talents à la disposition des industriels. Il faut que ces deux parties se réunissent et formulent leurs besoins d’une part et leurs idées innovantes d’autre part.
Sur la partie qualitative de l’innovation, même pour les entreprises faisant de l’innovation aujourd’hui, cette innovation reste incrémentale. Elle consiste en l’amélioration d’un produit déjà existant, et non pas à penser à créer un nouveau concept.
L’autre souci c’est que les entreprises veulent faire de l’innovation rapidement, et à des prix réduits, ce qui n’est pas toujours possible.
En plus les entreprises se concentrent beaucoup plus sur leur cœur de métier au lieu de remettre en cause l’existant, alors qu’il faudrait réfléchir également à des métiers adjacents sur lesquels il faut concevoir de nouvelles solutions et investir ainsi d’autres parts de marché.
Mis à part cela, Il faut que le secteur privé dépense plus d’argent en matière de recherche et développement pour que le secteur public ne soit pas le seul
secteur concerné.
Les principaux enjeux et défis de l’industrie: Le défi majeur de l’industrie marocaine
est de devenir le premier contributeur à la croissance du PIB et donc de la richesse nationale.
L’objectif du Plan d’Accélération Industrielle est de porter cette contribution à plus de 23%. Pour y arriver, il est nécessaire de développer des filières industrielles à forte valeur ajoutée locale et rompre avec les schémas de sous-traitance qui ont été le modèle opérationnel de base pour plusieurs industries depuis l’indépendance.
L’intégration voire la compensation industrielle est un réel enjeu. Pour y arriver, l’industrie nationale, à l’image de pays modèles pour le Maroc, doit développer de plus en plus de contenu local issu de programmes innovants qui permettraient de remplacer une grande partie des importations industrielles et de booster les exportations.
Renforcer l’éducation, l’innovation, l’esprit d’entrepreneuriat, renforcer les dispositifs réglementaires et normatifs et mettre à disposition des instruments financiers sont autant d’actions urgentes pour faire face à ces enjeux.
A notre niveau, nous intervenons beaucoup sur la normalisation, la certification et le suivi des projets industriels. Nous œuvrons à renforcer les capacités des entreprises industrielles en termes de compétences, de processus et d’intégrité des actifs. Nous intervenons aussi auprès d’écoles et d’associations sur les sujets de l’entrepreneuriat et de l’innovation. »

Said Benhajjou, Président du Cluster d’Électronique, Mécatronique, Mécanique du Maroc (CE3M)

La définition de l’innovation que nous avons retenue, c’est de faire ce qui est déjà fait ou de créer des produits déjà existants pour éviter ne serait-ce que le fait d’importer. Aujourd’hui les sociétés qui innovent sont majoritairement des sociétés à effectif réduit. Et quand bien même nous développons des produits marocains fonctionnels, il existe toujours malheureusement des idées reçues sur le produit marocain.
Nous avons de grandes difficultés à mettre ces produits sur le marché, il y a aussi des obstacles de normes, puisque la norme marocaine n’est pas reconnue auprès des entreprises. Il existe des savoir-faire au Maroc, maintenant ce qu’il faut c’est un accompagnement public.
Pour résumer, on dit que quand un produit ne fonctionne pas c’est qu’on est mauvais mais quand un produit étranger ne fonctionne pas c’est que c’est compliqué. Au niveau du Cluster d’Électronique, Mécatronique, Mécanique du Maroc (CE3M), nous voyons qu’il y a des porteurs de projets qui se battent tous les jours pour aller au delà de ces problématiques. »

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