La Banque mondiale et la Banque Africaine de Développement en sont unanimes : étant parmi les économies les plus performantes du monde, une cinquantaine de pays africain tire le continent vers le haut. Dans le rapport 2017 de la BAD le constat est approuvé : « les 54 économies africaines ont affiché une croissance de 2,2 % en moyenne en 2016 et de 3,6 % en 2017 ». Une évolution qui se poursuivrait, selon la même source, en 2018 avec une croissance moyenne qui connaîtrait une accélération de 4,1 %. Pour sa part, la Banque mondiale estime que « le Ghana croîtra à un rythme de 8,3 %, l’Éthiopie à 8,2 % et le Sénégal à 6,9 % ».
Côté investissements directs étrangers en Afrique, la BAD estime une hausse annuelle d’environ 60 milliards de dollars. Le besoin en matière d’investissement dans les infrastructures uniquement dépasse les « 170 milliards de dollars par an, soit 100 milliards de dollars de plus que ce qui est actuellement disponible ». « le Maroc et l’Égypte, sont les premiers destinataires d’IDE et constituent des hubs infrastructurels et financiers entre l’Europe et l’Afrique », précisent les deux banques.

Vers un espace unifié de libre-échange africain ?

Afrique-Occident : Il est temps de conclure des partenariats win-win.

« En 2015, le Marché commun pour l’Afrique de l’Est (COMESA), la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) ont décidé de fusionner pour former le plus vaste espace de libre-échange en Afrique, représentant 26 pays et 620 millions de consommateurs ». Et c’est parti. Trois années plus tard, plus précisément le 20 mars 2018 à Kigali, 44 pays ont fait un pas supplémentaire en signant un accord en vue de créer une Zone de libre-échange continentale (ZLEC) supprimant les droits de douane sur 90 % des produits.
L’objectif est de favoriser le commerce intra-africain, qui ne représente aujourd’hui que 16 % des échanges. L’ambition est d’arriver, d’ici à 2028, à la création d’un véritable marché commun et d’une union économique et monétaire en Afrique. Si le taux de pénétration mobile dépasse actuellement les 80 % dans de nombreux pays, 75 % des foyers africains devraient être connectés à Internet via mobile dès 2018, soit 1 foyer sur 10 en Europe. Encore une fois les chiffres parlent et font parler.
Le Cabinet Deloitte, lui, partage cette optique. Dans son étude publiée cette année, le Cabinet souligne que « 67% des utilisateurs de téléphones mobiles en Afrique déclarent être susceptibles d’acheter un smartphone dans les 12 prochains mois ». Un chiffre qui ne tardera pas à se multiplier d’ici à 2020. Selon les prévisions, « 660 millions d’Africains (contre 336 millions en 2016) devraient ainsi être équipés d’un smartphone » avant cette date.
Ce qui représente un taux de pénétration de près de 55 %, et près d’un demi-milliard d’accès Internet se feront alors via smartphone. De ce fait, bon nombre de compagnies aériennes africaines proposeront une connexion Internet dans les avions dès 2018, dont « 36 % des sondés sont prêts à payer plus de 20 $ pour accéder au wifi dans l’avion, c’est le premier service souhaité, à 46 %, devant la possibilité d’avoir un siège plus confortable, à 38 % », conclut le cabinet.

L’Afrique, priorité des pays européens.

Pourquoi ? Et comment ? Pour répondre à ces deux questions, il serait judicieux de voir de plus près la situation. Les chiffres démontrent qu’à titre d’exemple, « l’Agence française de développement (AFD) lui accorde un intérêt particulier avec 5,2 Md€ d’engagements en 2017, soit 50 % du montant total des engagements, dont plus de 1 Md€ consacré aux énergies renouvelables ». Et ce n’est pas tout, d’autres pays comme l’allemagne réserve les mêmes ambitions au continent africain. Pour preuve, l’Alliance Sahel, lancée en juillet 2017 par la France et l’Allemagne, et rejointe depuis par sept autres bailleurs internationaux, consacre également cette priorité stratégique, en mobilisant près de 7,5 milliards d’euros sur 5 ans. En une année, 2017, le bilan est considérable : « les projets accompagnés par l’AFD ont permis un accès à l’eau potable pérenne pour 822 milles personnes ; un accès à l’électricité pour 365 milles personnes ; la protection ou la restauration de 16 millions d’hectares d’espaces naturels ; l’installation de 3395 MW d’énergies renouvelables ; la scolarisation de 396 milles filles, etc. », soulignent la BAD et la Banque mondiale.
Le pourquoi de cet intérêt est claire aux yeux des observateurs. L’afrique est un pays innovant mais avant tout un marché potentiel attractif. Son potentiel humain lui vaut se privilège. L’Afrique compte plus d’un milliard d’habitants et en comptera 2,4 milliards en 2050. Le constat est presque irréfutable : en 2100, un humain sur trois en Europe serait africain. La population est en croissance avec l’évolution des capacités d’achat. Ce qui fait du continent le futur grand marché de consommateurs dans le monde. Les transformations socio-économiques en cours en Afrique ont permis l’avènement une classe émergente d’environ 300 millions de personnes actuellement.
Si l’ont croit le Boston Consulting Group, le nombre de consommateurs en Afrique pourrait même atteindre 1,1 milliard de personnes. Une population d’hommes et de femmes âgés de 18 à 75 ans, avec un revenu mensuel régulier compris entre 50 et 7 milles dollars par mois.
Mais, il ne faut pas oublier la classe populaire « flottante » et fragile. Cette catégorie, tout juste sortie de la pauvreté et fortement dépendante des aléas de la conjoncture économique, nécessite un soutien sur tous les plans. Sur le terrain, on reste encore loin des attentes de la Banque mondiale avec une inflation qui rend l’accès au logement difficile, une volonté d’émancipation des populations notamment au niveau politique demeure la source de conflits qui créent de l’instabilité économique au niveau national et régional.

Priorité à l’emploi en Afrique

En Afrique l’emploi reste la première des urgences. Le continent a impérativement besoin d’investissements durables pour faire face à des taux de chômage supérieurs à 50 % chez les jeunes. Les statistiques sont alarmantes : « en Afrique de l’Ouest, 80 % à 90 % des personnes travaillent dans le secteur agricole de manière informelle », précise l’OIT. La construction sera bientôt un fort pourvoyeur d’emplois, de même que l’industrie de transformation type textile ou agroalimentaire. Mais comment gagner la confiance des entrepreneurs ? Une question qui a fait couler beaucoup d’encre. Plusieurs politiques ont vu le jour pour répondre aux attentes. Les observateurs résument pour leur part la réponse en quelques mots : C’est grâce aux prêts accordés par les bailleurs de fonds internationaux que l’on peut instaurer un climat de confiance chez les entrepreneurs. C’est évident puisque les investisseurs en Afrique optent plus pour la création de fonctions supports telles que direction des ressources humaines, direction financière, comptables, etc.
Les métiers de l’informatique et du numérique devraient également connaître une forte croissance de 20 % à 30 % dans les années à venir, plus précisément à l’horizon 2020. Un souhait qui nécessite des efforts et des moyens. Côté ressources humaines, l’Afrique reste un gisement en la matière. Le potentiel humain est riche en Afrique surtout « avec 432.589 étudiants en mobilité internationale diplômante (2015), en augmentation par rapport à 2013 (+ 16 %), le continent représente environ un étudiant mobile sur dix dans le monde, avec un taux de mobilité deux fois plus élevé que la moyenne mondiale ». Le Maghreb reste au sommet avec « plus d’un étudiant africain mobile sur 5 est originaire du Maghreb (21,6 %), et si l’on ajoute le Nigeria, le Cameroun, le Zimbabwe et le Kenya, ces 7 pays représentent la moitié de la mobilité du continent ».

D’après les différentes études et enquêtes dédiées à ce chapitre, les observateurs restent convaincus que l’Europe perd du terrain au profit de la mobilité intracontinentale (21%), en particulier vers l’Afrique du Sud, le Ghana, la Tunisie ou le Maroc. Le Moyen-Orient et la Chine sont également en très nette progression ».
Pour répondre au besoin en matière de création d’opportunité d’emplois en Afrique, un nouveau segment interpelle plus d’un, à savoir l’emploi vert. D’où le lancement du programme d’appui à la création d’opportunité d’emplois verts (PACEV). Une initiative porteuse du ministère sénégalais de l’Environnement et du Développement durable, en collaboration avec le PNUD, qui a été lancée en 2016.
Il cible « les domaines de la construction, des énergies renouvelables, des déchets et de l’agroforesterie, incluant un renforcement des capacités techniques et d’entrepreneuriat des futurs salariés, en priorité des jeunes et des femmes », précise le communiqué rendu publique le jour du lancement dudit programme. D’une durée de 5 ans, le PACEV devrait contribuer à créer 10 milles emplois verts, dont 4 milles directs et 6 milles indirects.
S’y ajoute le Programme pour le Développement des Infrastructures en Afrique (PIDA) lancé par la Commission de l’Union Africaine (CUA) et la Banque africaine de développement (BAD) en 2010.
Le PIDA a pour objectif d’établir une stratégie cadre pour le développement des infrastructures à l’échelle régionale et continentale dans les domaines de l’énergie, du transport, de l’eau et des télécommunications. Le budget alloué à ce programme dépasse les 52 milliards d’euros. Un bon capital pour construire 40 milles km de routes, 30 milles km de voies ferrées et 20 milles km de lignes électriques à travers tout le continent d’ici à 2040. D’où la vaste campagne de recrutement en cours.


Mais les grands groupes africains recrutent ailleurs.


C’est ce qu’a attesté le cabinet McKinsey en 2010. Ainsi, le nombre d’entreprises qui réalisaient plus de 1 milliard de dollars de chiffre d’affaires en Afrique se situait entre 200 et 250. Selon la même source, « aujourd’hui, elles seraient plus de 400, dont une proportion grandissante de groupes issus du continent. Ces groupes africains seraient notamment des banques, des cimentiers, des industries agroalimentaires ainsi que des compagnies aériennes locales ». Même son de cloche chez le Boston Consulting Group qui indique que les groupes africains les plus performants ont un management très internationalisé.
Et de conclure : « les grands groupes n’ont désormais aucun mal à recruter des diplômés de grandes écoles d’origine africaine, qui comprennent que leurs possibilités d’évolution sont plus importantes en Afrique que dans les pays où ils ont étudié ». Rappelons que 70 % des jeunes Africains souhaitent retourner dans leur pays après leurs études (sondage auprès de la jeunesse africaine réalisé dans 19 pays en 2013). Pourquoi ? « 63 % par volonté d’avoir un impact sur le continent ; 49 % pour opportunité professionnelle intéressante et 22 % suite à une pression familiale et sociale », conclut la BAD.

Et pourtant le continent est attractif.
« Les start-ups africaines ont franchi, en 2017, le seuil des 500 millions de dollars de levées de fonds (467 millions d’euros), soit une progression historique de 53 % en un an », rappelle le fonds de capital-risque Partech Africa dans son dernier rapport. Et d’ajouter : « les 124 start-ups technologiques qui en ont bénéficié, 42 sont sudafricaines. Viennent ensuite les villes de Nairobi (Kenya) et Lagos (Nigeria) ». Quant au Caire, la capitale égyptienne représente un fort potentiel, notamment « dans le secteur de la santé connectée, avec VEZEETA, qui a levé, en 2017, 5 millions de dollars pour se déployer à l’international », dixit la même source qui indique que « le Maroc, le Rwanda, le Sénégal et la Tunisie ont attiré 55 millions de dollars d’investissement, contre 37 millions en 2016 et seulement 6 millions en 2015 ». Dans ces pays, les start-ups bancaires, « les fintech », demeurent toujours en haut du classement avec une nette progression de 70 % par rapport à 2016, avec les énergies renouvelables.
Les « insurtech », innovations technologiques dans le secteur des assurances, affichent mieux. Ils ont attiré 14 millions de dollars, soit un bond de 470 % par rapport à 2016. Comment ? « L’innovation requiert des investissements dans les infrastructures, une réglementation favorable, ainsi qu’une main-d’œuvre suffisamment formée », conclut la BAD.

Le Maroc est un cas d’école en la matière. Le pays a réussi dans un laps de temps record d’attirer les investisseurs dans des secteurs demeurant jusqu’à présent réservés aux grandes puissances économiques et industriels. La sous-traitance automobile par exemple ou l’industrie aéronautique occupe la place du lion dans les IDE au Maroc. Plusieurs pays voisins et africains tentent via des coopérations bilatérales ou multilatérales de profiter de ce poste avancé qu’occupe le Royaume pour booster leur industrie. C’est d’ailleurs le cas des autres secteurs comme l’immobilier ou les nouvelles technologies dans lesquels le Maroc est devenu exportateur de compétences. Les ressources humaines qualifiés ont le mérite dans cette position trop avancée du Maroc qui grâce à la vision royale et les stratégies instaurées par les ministère de tutelles en l’occurence le ministère de l’industrie a pu s’accaparer le leadership en la matière.

Rida ADDAM.

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