Interview avec BADR IKKEN
IDM : Depuis que vous êtes aux commandes de l’IRESEN, pouvez-vous nous dresser déjà un bilan d’étape ?
B.I. : La création de l’IRESEN a démarré fin 2011. Il a bien évidemment fallu créer et mettre en place l’institution et ce grâce au soutien effectif de nos membres fondateurs, ADEREE, SIE, OCP, MASEN, ONEE, ONHYM, CNESTEN, MANAGEM et la Fédération de l’Énergie et à leur tête le Ministère de l’Énergie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement ainsi que de notre conseil scientifique composé de plusieurs personnalités scientifiques imminentes.
Aujourd’hui l’IRESEN est constitué de deux entités :
Une agence de moyens pour financer la recherche appliquée dans le domaine des énergies renouvelables au profit des universités et centres de recherche ainsi que les entreprises et industries marocaines et étrangères.
D’ailleurs, IRESEN vient de franchir le cap de 100 millions de dirhams avec le lancement de deux nouveaux appels à projets au titre de l’année 2014 traitant des thématiques du photovoltaïque et de l’éolien (InnoPV-InnoWind 2014), et du solaire thermique et la biomasse couplée au solaire (InnoTherm- InnoBiomass 2014).
Un centre de recherche appliquée composé de trois départements : le département de modélisation, la direction des systèmes thermodynamiques et la direction des systèmes photovoltaïques, qui gère et mène aujourd’hui plusieurs projets de recherche au niveau national et international.
À ce titre, une première plateforme de recherche dans le domaine des énergies renouvelables avec un focus sur le solaire en partenariat avec notre membre fondateur OCP et avec le soutien de plusieurs partenaires et experts est en cours de construction sur une superficie de 8 hectares incluant des laboratoires de recherche de pointe et plusieurs projet-pilotes dans la ville de Benguérir à proximité de l’Université polytechnique Mohammed VI.
IDM : Est-il possible d’avoir une idée sur les premiers semis de vos échanges avec les entreprises et les industries ? Et qui sont-elles ?
B.I. : IRESEN finance aujourd’hui plus de 24 projets innovants dans le domaine du solaire thermique, du solaire photovoltaïque, du dessalement des eaux couplé au solaire, du stockage et gestion des réseaux intelligents et agrège plusieurs universités et centres de recherche ainsi que plus de 20 petites, moyennes et grandes entreprises dans des consortiums régies par des conventions de collaboration.
À ce titre, je citerai pour illustration :
L’entreprise marocaine A2S Industrie avec l’Université Hassan 1er de Settat codéveloppent un onduleur innovant adapté au marché marocain,
Le groupe marocain MANAGEM avec l’Université Cadi-Ayyad de Marrakech, REMINEX et le CSIC en Espagne codéveloppent des batteries Lithium-Ion,
L’entreprise marocaine Inter Tridim, l’entreprise française Aqylon et l’ENSAM de l’Université Moulay Ismail codéveloppent un champ solaire de type Fresnel à faible concentration,
Le groupe Ciments du Maroc avec l’université Ibn Zohr d’Agadir, l’école polytechnique fédérale de Zurich et l’entreprise Airlight Energy Maroc (ALEM) codéveloppent un système d’évaluation des performances des sites thermosolaires et l’application au site CSP de la Cimenterie d’Ait Baha,
LSA INDUSTRIE avec l’Université Moulay Ismail, le Centre National de l’Énergie, des Sciences et Techniques Nucléaires (CNESTEN), l’Université Hassan II de Mohammedia ainsi que PSA Ciemat en Espagne co-développent une installation pilote de dessalement solaire des eaux saumâtres,Le groupe OCP, l’entreprise Jet Alu avec l’Université Internationale de Rabat, l’Université Abdel El Malek Essaadi-FST de Tanger, l’Université Roi Abdallah des Sciences et Technologies (KAUST) et le Groupe Acwa Power d’Arabie Saoudite codéveloppent un système de dessalement d’eau de mer couplé au solaire,
L’entreprise AIC Métallurgie du groupe Delta holding avec l’Université Internationale de Rabat (UIR), l’université Sidi Mohammed Ben Abdallah et l’entreprise portugaise MAGPOWER codéveloppent du photovoltaïque à concentration adaptée au Maroc à faible coût.
IDM : Une de vos missions est d’accompagner et financer les projets innovants. Où en êtes-vous par rapport à ce chantier?
B.I. : Les membres fondateurs de l’IRESEN souhaitent contribuer à travers l’institut au développement de la recherche appliquée et de l’innovation au Maroc dans le domaine des énergies renouvelables en mettant à disposition des moyens financiers et humains mutualisés au service des universités marocaines, écoles d’ingénieurs , centres de recherche et bien évidement le secteur privé, en soutenant la création de nouveaux métiers dans le secteur des EnR ainsi qu’en facilitant l’émergence de secteurs nouveaux à forte valeur ajoutée.
La mission de l’IRESEN ne se limite pas au financement des projets, mais couvre toutes les étapes de réalisation en développant et mettant à la disposition des porteurs des projets un package de services d’accompagnement et de suivi pour garantir une bonne implémentation et atteinte des résultats.
À cet égard, IRESEN se charge de la gestion des fonds alloués aux projets, de l’acquisition des équipements de recherche et contribue ainsi au développement des laboratoires et unités de recherche logées au sein des universités, des écoles et des centres de recherche marocains.
IRESEN œuvre également pour la formation des enseignants chercheurs et le renforcement des capacités, en rendant les projets un incubateur de compétences locales pour le Maroc de demain.
Le système établi par l’IRESEN est actuellement mis à la disposition de plus de 200 doctorants, étudiants master et ingénieurs sous l’encadrement de plus de 40 chercheurs marocains dans le domaine des énergies renouvelables qui mènent leurs travaux de recherche suite à la sélection de leurs projets dans le cadre des 5 appels à projet lancés par l’IRESEN et ce depuis l’année 2012.
IDM : Étant un centre de recherche industrielle, pourrait-on déjà espérer vous voir arriver à des coûts plus optimisés en matière de technologie solaire ?
B.I. : Absolument, cet objectif est totalement réaliste. Si on prend le cas du photovoltaïque le grand potentiel d’optimisation des coûts se situe aujourd’hui au niveau du «BoS – Balance of system» intégrant les activités liées aux structures métalliques, au câblage, aux onduleurs, aux fondations, à l’installation et la maintenance et moins au niveau des cellules et des modules photovoltaïques. Plusieurs entreprises et industries marocaines se sont déjà positionnées sur des maillons de la chaine du BoS et pourront avec de la spécialisation, l’adaptation et l’accompagnement réaliser cet objectif pour réduire les coûts.
Plusieurs projets que financent IRESEN contribueront à l’optimisation de composants spécifiques, mais également l’émergence de systèmes complets adaptés aux conditions climatiques marocaines tel que le photovoltaïque à concentration (CPV) ou les systèmes de rafraichissement ou climatisation solaire.
Je pense qu’il est très important de rappeler qu’avec notre membre fondateur OCP, nous sommes en train de réaliser une plateforme internationale de test, de recherche et de formation pour les énergies renouvelables «Green Energy Park» au niveau de la ville de Ben guérir et que cette plateforme de 8 hectares offrira aux universités, mais surtout aux entreprises et industries marocaines une plateforme d’excellence pour développer, tester ou valider différentes technologies liées au solaire et que sa particularité sera d’offrir des équipements de pointe, mais également plusieurs projets pilotes à grande échelle pour également entrainer et développer l’expertise dans le domaine de l’exploitation et la maintenance de petites et de grandes installations solaires.

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