« La nouvelle ère industrielle portée vers et par la souveraineté » était ce 12 juillet 2024 au cœur des discussions lors du premier panel de la deuxième journée d’Industry Meeting Morocco 2024, à Tanger. Réunissant des experts de divers horizons, les deux rounds du panel ont mis en lumière la quête de souveraineté nationale, économique tout en redéfinissant les stratégies industrielles contemporaines.
Au nombre de quatre pour le premier round du panel et cinq pour le second, les intervenants sont Obaid Amrane, Directeur Général d’Ithmar Capital, présent en sa qualité de président du Cluster des énergies renouvelables ; Mohssine Semmar, Président du directoire de MEDZ ; Yassine Tazi, Directeur Général du Centre Régional d’Investissement (CRI) de Fès-Meknès et Lamiae Benmakhlouf, Directrice Générale du Technopark de Casablanca pour la première partie des échanges.
Tandis que Abed Chagar, Président de la Fédération de la Chimie et de la Parachimie FCP ; Yassine Laghzioui, CEO UM6P Ventures et CEO PHOVA Technology ; Abdelghani Kacimi, Chief Technology Officer – INNOVX ; Meriem Filali, Head of Legal & Compliance Nestlé Maroc et Rachid Machou, Vice-Président de l’AMICA ont pris part à la deuxième partie de cette contribution sur « La nouvelle ère industrielle portée vers et par la souveraineté ».
L’essor technologique, caractérisé par des avancées significatives dans l’intelligence artificielle, la robotique, et la fabrication additive, joue un rôle pivot dans cette transformation. Les intervenants ont souligné que ces innovations permettent de réduire la dépendance vis-à-vis des chaînes d’approvisionnement globales, souvent fragiles face aux perturbations.
Obaid Amrane, Directeur Général d’Ithmar Capital, présent en sa qualité de président du Cluster des énergies renouvelables a axé son intervention sur les clés d’une croissance durable pour le Maroc, en soulignant l’importance de l’industrialisation et de l’exportation. Il a affirmé que « aucun pays au monde n’a connu une croissance économique sans une croissance industrielle », ajoutant que pour le Royaume, l’augmentation de la taille des marchés et l’accès à des marchés internationaux sont essentiels.
Il a également insisté sur l’importance des entrepreneurs et des jeunes talents marocains, qu’il considère comme capables de relever les défis actuels. Il a rappelé que le monde, en constante évolution, exige des approches innovantes en matière de financement et d’investissement. La souveraineté industrielle, selon lui, est étroitement liée à la souveraineté énergétique. Dans ce cadre, le Maroc possède des atouts significatifs qui pourraient le propulser en tant que leader régional, voire au-delà. Le secteur de l’énergie, crucial dans la transition énergétique mondiale, est au cœur des stratégies de développement du Maroc. M. Amrane a salué les efforts du ministère pour accompagner les entreprises dans cette phase de transition. Il a mentionné le rôle du Cluster des énergies renouvelables, qui soutient les entreprises marocaines par l’incubation de projets et la modernisation du cadre réglementaire. L’objectif est ambitieux : doubler le nombre d’emplois dans ce secteur en multipliant les efforts actuels par dix.
Pour atteindre ces objectifs, le directeur d’Ithmar a souligné l’importance de l’innovation, notamment à travers l’intelligence artificielle, et de l’amélioration continue des systèmes de production. Il a appelé à une réflexion stratégique sur les secteurs dans lesquels le Maroc possède un avantage compétitif, en particulier les énergies renouvelables. La demande future pour les investissements et la création de valeur au Maroc pourrait bénéficier du verdissement des chaînes de valeur européennes. Le soutien d’Ithmar Capital est essentiel pour attirer et développer des projets de grande envergure. Le président du Cluster Energie a insisté sur la nécessité de créer des conditions favorables pour accueillir ces projets, souvent très importants, et a souligné l’importance de la coopération entre les acteurs industriels. En travaillant ensemble, le Maroc peut non seulement capter ces opportunités mais aussi se positionner comme un pionnier dans les énergies renouvelables et l’industrialisation durable.
Attirer de nouveaux investisseurs pour une dynamique compétitive
A la suite du directeur Ithmar Capital, le président du directoire – MEDZ, Mohssine Semmar a expliqué comment l’entreprise s’est alignée sur les différentes initiatives nationales, telles que la première version du pacte pour l’émergence industrielle et le plan d’accélération industrielle.
« Tout au long de cette évolution, nous sommes restés à l’écoute de ces stratégies, » affirme Semmar. « Une écoute active et agissante, dans le sens où nous avons toujours essayé d’arrimer notre offre de valeur de manière à ce qu’elle intègre les enjeux stratégiques de notre pays, à savoir la compétitivité d’abord. » Les zones industrielles développées par MEDZ sont conçues pour répondre aux exigences de compétitivité, en intégrant des infrastructures de qualité, une connectivité optimale, un bassin d’emploi diversifié et un ancrage solide dans le monde du savoir et de la recherche. Face aux évolutions mondiales, MEDZ a également pris en compte les enjeux de la décarbonation. « Aujourd’hui, avec les changements qui se sont opérés dans le monde, nous avons l’enjeu de la décarbonation et nous travaillons sur un projet de Smart Zone, » a déclaré M. Semmar. Présenté lors de GITEX, ce projet vise à créer un environnement attractif et durable pour le développement industriel.
Les résultats de MEDZ sont impressionnants, notamment dans le secteur automobile où le taux d’intégration a atteint 65%, avec un objectif de 80%. Dans le secteur aéronautique, la zone Midparc affiche un taux d’intégration de 42%, avec une ambition de 50%. « Cela ne peut être que de la souveraineté, » a fait remarqué le président du directoire, en insistant sur l’importance de produire localement. La dynamique du secteur automobile au Maroc renforce la démarche de MEDZ pour attirer d’autres constructeurs et investissements stratégiques. « Nous restons mobilisés pour que notre offre reste compétitive et qu’elle puisse attirer le maximum d’investissements créateurs de valeur et d’emplois, » a ajouté Mohssine Semmar. Les gigafactory encours de développement témoignent de cette ambition. MEDZ vise également à concilier développement résidentiel, inclusivité et durabilité dans ses espaces. En accompagnant les territoires, MEDZ adopte une approche économique, identifiant les secteurs capables de stimuler la croissance de chaque région. Une fois ces secteurs identifiés, des projets spatialement programmés sont mis en œuvre, avec une flexibilité permettant d’intégrer d’autres activités. Cette approche proactive et inclusive, fondée sur une écoute attentive des besoins nationaux et territoriaux, positionne MEDZ comme un acteur clé du développement industriel marocain, favorisant une croissance durable et intégrée.
Fès-Meknès : une région résolument engagée
La région Fès-Meknès est résolument engagée dans la réalisation de la vision de Sa Majesté pour une transformation industrielle et une souveraineté accrue. C’est dans ce contexte que Yassine Tazi, Directeur Général du Centre Régional d’Investissement (CRI) de Fès-Meknès, s’est exprimé sur les initiatives en cours.
M. Tazi a souligné l’importance des énergies renouvelables et du foncier comme éléments essentiels pour atteindre cette souveraineté. Il a également mis en avant deux autres piliers : le capital humain et l’innovation. La région Fès-Meknès, première en termes de pôle universitaire avec ses six universités actives et plus de 263 écoles spécialisées, capitalise sur cette richesse intellectuelle. La création de la Fès Smart Factory, un hub de l’industrie 4.0, en est une illustration éloquente.
En ce qui concerne le foncier, M. Tazi a rappelé les efforts déployés pour surmonter les défis liés à la spéculation. Des études sur le foncier industriel ont été menées, et des solutions concrètes ont été trouvées, comme la création du parc industriel d’Aïn Cheggag de 81 hectares, incluant un district dédié au cuir. D’autres projets sont en cours, telle la zone d’accélération industrielle portée par la CDG et la zone industrielle Ain Bida, avec une attention particulière aux industries propres. Le CRI a élaboré une stratégie de développement économique et écologique, en collaboration avec le Conseil régional, visant à répondre aux attentes des investisseurs internationaux. Cette stratégie se concentre sur cinq écosystèmes : l’agriculture (incluant l’agroalimentaire, les plantes médicinales et aromatiques, et le cannabis), la mobilité (avec des acteurs comme Alstom), le textile et le cuir, les industries créatives et digitales.
Pour soutenir ces initiatives, plusieurs mécanismes incitatifs ont été mis en place, dont un fonds de souveraineté industrielle visant à encourager la substitution à l’importation, ainsi que des dispositifs d’appui à l’export et au développement des zones industrielles. L’objectif est de doubler le nombre d’emplois d’ici 2030 et de le multiplier par 4,5 d’ici 2035, échéance du nouveau modèle de développement. M. Tazi a conclu en soulignant l’importance de la collaboration et de l’approche participative avec tous les acteurs nationaux et régionaux pour atteindre ces objectifs ambitieux. La région Fès-Meknès se positionne ainsi comme un acteur clé de la transformation industrielle et de l’innovation au Maroc.
Parvenir à la souveraineté par l’utilisation optimale des territoires
La dernière intervenante du panel en la personne de Mme Lamiae Benmakhlouf, Directrice Générale du Technopark, a abordé plusieurs sujets essentiels liés à la souveraineté énergétique et intellectuelle du Royaume. Elle a rappelé l’importance de l’autonomie énergétique et de la capacité de fabrication et d’exportation, ainsi que de l’utilisation optimale des territoires offerts par le royaume. Selon Mme Benmakhlouf, nous ne sommes plus dans une logique de centralisation, mais bien de régionalisation et d’attractivité des territoires.