À l’occasion de la 7ᵉ édition du Marrakech Air Show, Industrie du Maroc Magazine a rencontré Benbrahim El Andaloussi, président de Midparc et expert reconnu du secteur aéronautique, pour discuter des partenariats stratégiques signés récemment, dont celui avec Safran et Duqueine Composites, et pour explorer les ambitions futures du Maroc dans les domaines de l’aéronautique et de la défense.
IDM : Pour commencer, pourriez-vous nous expliquer les principaux objectifs du partenariat signé avec Safran et comment cela s’intègre dans la stratégie de développement de Midparc en tant que plateforme industrielle ?
Benbrahim El Andaloussi : La journée d’hier a été marquante pour le secteur aéronautique, avec l’annonce par Safran de l’implantation au Maroc d’un centre dédié à l’entretien, la modification et la révision du moteur LEAP, développé en coentreprise avec General Electric. Ce moteur, qui équipe les Airbus A320 NEO, Boeing 737 MAX et COMAC 919, est le plus populaire au monde. Ce choix est significatif, car Safran, présent au Maroc depuis 25 ans, a joué un rôle clé dans le développement du secteur en attirant des compétences stratégiques et en créant un écosystème autour de ses activités. Ce projet confirme que le Maroc est devenu une plateforme incontournable, compétitive et de haute qualité pour l’industrie aéronautique.
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Quelles perspectives ouvre ce projet pour l’industrie marocaine ?
Ce projet est structurant pour notre industrie et nous ouvre de nouvelles perspectives dans le domaine des services, secteur dans lequel notre performance reste encore à développer. Les services représentent près de la moitié des revenus du secteur aéronautique sur les vingt prochaines années, soit environ 4000 milliards de dollars. Avec ce projet, nous pénétrons activement dans les activités d’entretien, de modification, de révision des moteurs, des avions, des équipements, et même dans la transformation d’avions passagers en avions-cargos après vingt à vingt-cinq ans d’exploitation. Cela représente des opportunités de croissance et d’emplois pour nos jeunes talents marocains.
Comment le modèle économique de Midparc est-il conçu pour répondre efficacement aux attentes spécifiques des industriels du secteur aéronautique ?
Le modèle économique de Midparc repose sur la proximité de l’Institut des Métiers de l’Aéronautique (IMA), ce qui permet une formation rapide et pertinente répondant aux besoins des industriels. Dans le domaine de l’entretien des avions, des moteurs et des équipements, le potentiel est immense. Le marché mondial de l’entretien s’élève à 4000 milliards de dollars pour les vingt prochaines années, avec un besoin de plus de deux millions de techniciens pour assurer l’entretien, la modification et la transformation des appareils. Le Maroc est bien positionné pour former les talents nécessaires, répondant ainsi aux attentes de l’industrie, tant au niveau national qu’international.
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre partenariat avec Duqueine Composites ?
Nous avons signé un accord avec Duqueine Composites pour leur implantation à Midparc. C’est un acteur majeur avec des technologies différenciantes, ce qui est essentiel pour accompagner la transformation du secteur aéronautique vers une empreinte carbone neutre d’ici 2050. Les « autoroutes » de transformation pour atteindre cet objectif incluent notamment l’usage de matériaux composites plus légers. De plus, le Maroc est présent dans le domaine des moteurs, un secteur stratégique pour la réduction des émissions. À terme, nous visons des moteurs utilisant des biocarburants, puis de l’hydrogène d’ici 2040-2050. Grâce aux projets en cours et aux récents développements de Midparc, nous avançons dans cette voie de transformation technologique du secteur.
Vous avez assisté à l’inauguration de plusieurs projets liés à l’industrie de la défense au Maroc. Quel avenir voyez-vous pour le Maroc dans ce secteur ?
Le Maroc mène en effet des programmes d’équipement en défense et a signé des accords de compensation industrielle, qui obligent certains groupes à réaliser une partie de leur production dans le pays. Nous avons déjà des entreprises aéronautiques travaillant dans le câblage et l’électronique pour la défense. Ce qui est encourageant, c’est que ces sociétés, en constatant notre capacité et notre niveau technologique, perçoivent le Maroc comme une base de production compétitive, non seulement pour la défense nationale, mais aussi pour les marchés internationaux, notamment en Afrique et en Europe du Sud.
Quelles sont les raisons qui poussent ces sociétés à envisager le Maroc pour leur production de défense ?
Trois facteurs principaux jouent en notre faveur. Premièrement, l’augmentation des budgets de défense dans le monde entier crée une forte demande. Deuxièmement, de nombreuses entreprises peinent à recruter suffisamment de main-d’œuvre qualifiée. Enfin, le coût de production élevé dans certaines régions rend le Maroc attractif comme base de production. Nous sommes donc bien positionnés pour développer une industrie de la défense compétitive, et nous annoncerons prochainement les premières implantations dans ce domaine à Midparc.
Propos recueillis par Rachid Mahmoudi