Lors de son intervention au Forum Marocain de l’Emploi et de la Compétence (FMEC) 2024, Ryad Mezzour, Ministre de l’Industrie et du Commerce, a dressé un tableau à la fois critique et ambitieux de la situation de l’emploi industriel au Maroc. Plaçant la responsabilité sur l’ensemble des acteurs économiques, le ministre a insisté sur l’urgence d’accroître la contribution de l’industrie pour répondre aux attentes des jeunes Marocains en quête d’un avenir.
D’entrée de jeu, le ministre a frappé fort : « L’industrie marocaine ne recrute pas assez. Pas suffisamment. Elle ne contribue pas assez à ce que les Marocains méritent. » Tout en reconnaissant les efforts fournis par certains acteurs, il a souligné que ces initiatives restaient insuffisantes face aux défis majeurs auxquels le pays est confronté, notamment les 400 000 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché de l’emploi. « Un travail, ce n’est pas un luxe. C’est un avenir, un espoir, une vie à construire. »
Un appel à la mobilisation collective
Ryad Mezzour a rappelé que répondre aux attentes de ces jeunes n’est pas une option, mais une obligation. « Ce n’est pas une question de gouvernement, d’opérateurs ou d’investisseurs. C’est une nécessité absolue. » Le ministre a mis en lumière l’urgence de la situation, interpellant son auditoire : « Qu’est-ce qu’on fait des 200 000 jeunes qu’on laisse sur le bord de la route chaque année ? Chacun d’entre nous connaît un jeune compétent dans son entourage, diplômé, motivé, et pourtant sans emploi. Est-ce normal ? »
Pour Ryad Mezzour, cette réalité est d’autant plus inacceptable que le Maroc dispose de toutes les ressources nécessaires pour réussir. « Nous avons une infrastructure de classe mondiale. Nous avons un système de formation qui, malgré ses critiques, produit des jeunes compétents et reconnus à l’international. » En évoquant les jeunes Marocains qui s’intègrent dans des entreprises au Canada, en Europe ou ailleurs, il a insisté sur la qualité et le potentiel de ces talents : « Ils sont bons, ils sont motivés, et pourtant, nous ne leur faisons pas suffisamment confiance. »
Le défi du doublement des emplois industriels
Le ministre a plaidé pour une ambition collective de doubler les créations d’emplois industriels, une mesure qu’il a qualifiée d’urgente et d’indispensable : « Ce slogan du x2 n’est pas un simple slogan. C’est un objectif. Il doit devenir un KPI pour chacun d’entre nous. » Pour y parvenir, il a appelé les entreprises à sortir de leur zone de confort et à investir davantage dans la conquête de nouveaux marchés. « Nous devons être plus ambitieux, plus conquérants, et prendre plus de risques. »
Ryad Mezzour a également dénoncé certaines pratiques qui freinent l’intégration des jeunes dans le marché du travail. Il a fustigé la tendance à exiger des compétences immédiatement opérationnelles sans offrir de formation en entreprise. « L’époque où une entreprise formait un jeune avant de l’intégrer est révolue. Aujourd’hui, on veut un mouton à cinq pattes, tout de suite. »
Il a exhorté les employeurs à revoir leurs pratiques, soulignant que les jeunes Marocains sont une ressource précieuse : « Ce sont nos enfants. Ils sont bons, ils sont forts, ils sont mondialisés. Si vous voulez les garder, faites-leur confiance. Investissez dans nos jeunes. »
Un tournant économique et sociétal
Selon le ministre, le Maroc est à un moment charnière de son histoire. « Nous vivons un tournant économique, social et même sociétal majeur. Toutes les conditions sont réunies pour que ce pays décolle enfin. » Cependant, il a averti que ce décollage dépendra de la capacité des acteurs économiques à répondre aux attentes de la jeunesse. « Avec 200 000 jeunes par an qui attendent un espoir, rester dans notre petit confort n’est pas tenable. »
Pour conclure, Ryad Mezzour a lancé un appel vibrant à l’action : « Recrutez-les, formez-les, et allez conquérir le monde. Ils sont là pour vous aider. C’est une armée magnifique. »