Le ministère de l’Équipement et de l’Eau a officiellement lancé hier un Pôle Technologique intégré, qui marque une étape décisive dans la transformation du système national de formation, de recherche appliquée et d’ingénierie publique. Cette initiative, pilotée dans le cadre de la Vision 2040 du ministère, vise à faire du Maroc un acteur souverain dans le développement et la maîtrise des technologies critiques, tout en répondant aux grands défis nationaux liés à l’eau, à l’énergie, aux infrastructures et aux transitions écologique et numérique.

prérequis
Le projet s’inspire des hautes orientations royales appelant à une nouvelle ère industrielle fondée sur la souveraineté. Il s’inscrit dans une dynamique de réforme globale du modèle de production des connaissances techniques et scientifiques, avec pour ambition de passer d’un système fragmenté à un écosystème intégré, performant et orienté vers l’impact. L’enjeu est de taille : il s’agit de doter le pays d’un levier capable de soutenir l’excellence de son capital humain, d’accompagner la transformation digitale des politiques publiques et d’amplifier la place du Maroc dans les chaînes de valeur régionales et internationales.
Au cœur de cette réforme, le ministère mise sur la convergence de trois institutions stratégiques : l’École Hassania des Travaux Publics (EHTP), le Laboratoire Public d’Essais et d’Études (LPEE), et le Centre National d’Ingénierie et de Développement (CID). L’EHTP, en pleine refonte académique, adoptera un nouveau modèle pédagogique tourné vers l’interdisciplinarité, l’ouverture internationale et l’innovation, avec l’ambition d’établir plus de 50 partenariats universitaires à l’horizon 2040. L’établissement introduira également de nouvelles filières prioritaires comme l’intelligence artificielle, les systèmes d’information, la data science, l’hydrogène vert, la robotique et la cybersécurité. De son côté, le LPEE verra ses missions renforcées pour devenir un pilier national dans les domaines de l’expérimentation, de la certification technique et de l’innovation normative. Il s’attachera aussi à adapter ses laboratoires aux standards internationaux et à élargir son spectre d’intervention aux secteurs émergents. Quant au CID, il se positionnera comme un acteur de l’ingénierie souveraine, capable d’accompagner des projets d’envergure, de proposer une expertise de haut niveau et de rayonner à l’international, notamment en Afrique et au Moyen-Orient.

consiste à produire et sécuriser,
en toute autonomie, des
technologies clés innovantes,
répondant aux besoins actuels et
futurs.
Le Pôle Technologique s’articulera autour de six grands axes d’action, allant du renforcement des compétences à la structuration des infrastructures critiques, en passant par le soutien à l’innovation appliquée, la valorisation des savoirs, la diplomatie scientifique et le développement territorial. Le ministère entend ainsi rompre avec une logique institutionnelle cloisonnée pour mettre en place un système cohérent, axé sur la performance, la mutualisation des ressources et la mise en réseau des talents.
La stratégie prévoit également une réforme profonde de la gouvernance, avec la création de comités scientifiques permanents, le renforcement du conseil d’administration élargi, la mise en place d’indicateurs de pilotage et la généralisation de l’approche genre et inclusion dans les dispositifs de formation et de recherche. Ce changement sera soutenu par une stratégie RH ambitieuse, orientée vers le recrutement de profils à fort potentiel et la rétention des talents.

Le déploiement territorial du Pôle ne se limitera pas à Casablanca. Les Instituts Spécialisés des Travaux Publics (ISTP) de Rabat, Marrakech et Laâyoune seront pleinement intégrés à cette dynamique. Ils bénéficieront d’une réforme pédagogique, d’un accompagnement à la certification, et de la création de nouvelles filières adaptées aux besoins réels des territoires, telles que le dessalement, les infrastructures sportives, les routes intelligentes ou encore la météorologie.
Ce chantier structurant est également appuyé par une série d’initiatives concrètes déjà enclenchées : réforme du modèle économique du CID avec la création de filiales spécialisées (cybersécurité, digitalisation, conseil), élaboration d’un mécanisme de financement pérenne basé sur une convention en Groupement d’Intérêt Public (GIP), et déploiement d’un plan de communication ambitieux pour positionner le Pôle à l’échelle africaine. En parallèle, une dizaine de projets pilotes, à fort potentiel de démonstration, seront lancés dès 2025 afin de matérialiser les premières retombées de cette stratégie.
Le Maroc affirme ainsi, par cette initiative, sa volonté de bâtir une souveraineté technologique réelle, en ancrant ses capacités de production, de formation et d’innovation dans une vision long terme, à la fois inclusive, territorialisée et ouverte sur le monde.
Rachid Mahmoudi