Lors de l’événement Les Industrielles, un panel d’expertes a échangé sur l’entrepreneuriat féminin au Maroc et en Afrique, mettant en lumière les opportunités et les défis du secteur.
Sara Jaïdi, cofondatrice de Kiwi Collect, la première plateforme marocaine de financement participatif, a dressé un constat clair : le monde des startups reste difficile d’accès pour les femmes. En 2024, sur vingt levées de fonds recensées au Maroc, seize concernent des fondateurs masculins, et seules une ou deux ont une femme à leur tête. Ce constat reflète une tendance générale en Afrique, où trois quarts des femmes entrepreneures citent l’accès au financement comme leur principal obstacle.
Pour Nisrine Ouazzani Chahdi, à la direction de l’entrepreneuriat et du venturing chez l’UM6P, bien que ces inégalités persistent, des progrès notables sont à souligner. Elle met en avant l’essor d’un accompagnement personnalisé pour les femmes fondatrices, combinant formations en soft skills et flexibilité du travail. L’objectif ? Créer un environnement propice à l’épanouissement des femmes entrepreneures.
Des défis systémiques
Aabir Krol Rhardane, experte en investissement international, souligne les difficultés structurelles du système financier marocain. Le pays ne compte qu’une vingtaine de levées de fonds en 2024, un chiffre très faible comparé à d’autres marchés internationaux. Selon elle, le manque de maturité du système d’investissement pénalise autant les hommes que les femmes. Elle insiste sur l’importance pour les entrepreneures de structurer leur discours pour convaincre les investisseurs, notamment en adoptant des présentations innovantes.
De son côté, Nadia Hmaity, directrice marketing et communication chez PolluClean, met en avant le potentiel du financement vert. Dans un contexte climatique complexe, de nouvelles opportunités de financement se développent, notamment pour les projets éco-responsables. Cependant, elle rappelle que seuls 14,6 % des entreprises dirigées par des femmes accèdent au crédit, un chiffre qui met en évidence l’inégalité d’accès aux ressources.
Innovation et audace : des leviers de transformation
Charlotte Wieder, General Manager de LaunchX, insiste sur la nécessité de coupler innovation et audace. Pour elle, le Maroc a fait un bond en avant en termes d’opportunités professionnelles. Elle préconise une approche stratégique pour minimiser les risques et optimiser les chances de succès. L’équipe de LaunchX accompagne ainsi les entreprises marocaines dans le lancement de projets durables, en insistant sur la diversification des équipes et l’adoption de stratégies bien définies.
Maître Amal Msanda, présidente de l’Ordre des notaires de Casablanca, met en avant un autre pilier essentiel de la réussite entrepreneuriale : l’éthique. Dans un environnement économique où les scandales financiers sont réguliers, elle rappelle l’importance de la transparence et du respect des règles déontologiques. Selon elle, les femmes notaires ont su imposer leur empreinte dans le milieu juridique marocain, preuve que la mixité peut apporter des changements positifs.
L’entrepreneuriat féminin vers une évolution nécessaire
L’entrepreneuriat féminin au Maroc et en Afrique est confronté à de nombreux défis, notamment en matière de financement et de reconnaissance. Toutefois, l’émergence de nouvelles initiatives, la sensibilisation des investisseurs et la structuration progressive de l’écosystème entrepreneurial ouvrent des perspectives encourageantes.
Comme le souligne Nisrine Ouazzani Chahdi, il est essentiel d’intégrer dès aujourd’hui la question du genre dans le développement de l’économie marocaine, pour éviter de reproduire les inégalités observées ailleurs. L’audace, l’innovation et l’éthique doivent ainsi être les moteurs d’un entrepreneuriat plus inclusif et équitable.