ENTRETIEN Hassan Baraka, manager sportif, DG de HB Sport consulting.

IDM: Vous avez été le premier marocain à avoir rallié les 5 continents à la nage et vous avez réalisé 7 marathons en 7 jours sur 7 continents. Vous avez initié le BinSwimrun au Maroc fin mai. Depuis quand le sport vous a-t’il piqué?

Hassan Baraka: J’ai toujours voulu réussir dans le sport. J’ai commencé par faire du judo puis du football, puis je suis allé en Espagne puis en France pour devenir professionnel de rugby. Mais une blessure à l’épaule y a mis fin. Je faisais un bac + 5 en économie et gestion en parallèle et donc c’est là que j’ai bifurqué vers un master de gestion des institutions et des activités sportives à Toulouse. J’ai eu mon diplôme en 2011 et j’ai fini par 6 mois à l’Insep (institut national du sport d’expertise de la performance). C’est là que s’entrainent deux tiers des médaillés français. Donc j’ai baigné dans un endroit où tous les ingrédients étaient mis en place pour concocter des champions en termes de motivation, de planning d’entrainement… Tout cela m’a permis d’avoir ce panorama de ce qu’il faut pour arriver à la performance (une dizaine d’années d’entrainement, l’équivalent de 10.000 heures pour ma part) et de tout ce qu’il faut mettre en place autour.
C’est pour cela que quand je suis rentré au Maroc, j’ai créé ma boite, HB Sport consulting, pour organiser des événements sportifs étant donné que je suis passionné de sport et que j’ai pris part à plusieurs compétitions à travers le monde. Mais aussi pour faire du consulting avec les fédérations pour développer le sport en général, et aussi démocratiser certains sports comme le golf… et faire émerger de nouvelles disciplines comme le swimrun qui a commencé en Suède en 2006 et qui consiste à alterner course à pied et natation. Après avoir participé au championnat du monde de swimrun en Suéde en septembre 2015, j’ai importé cette discipline au Maroc en organisant le Binswimrun, et la compétition s’est déroulée le 29 avril à Bin El Ouidane.

Êtes-vous souvent sollicité par des entreprises pour organiser des inventives pour leurs employés ?
Je suis sollicité dans ce cadre là, que ce soit pour des speech motivationnels où je fais éclore l’étincelle qu’il y a en chacun d’entre nous, que pour des conférences motivationnelles ou des team building pour qu’ils le mettent réellement en pratique, parfois à travers des jeux sportifs ou des ateliers de réflexion où eux-mêmes vont sortir de leur zone de confort et développer leur esprit d’équipe et d’innovation.
Quand on a un défi, il va y avoir beaucoup de barrières sur notre chemin et il faut toujours essayer d’innover pour contourner les barrières. Par exemple, quand j’ai rallié les continents à la nage, pour rallier l’Océanie à l’Asie il fallait nager de l’Australie à l’Indonésie, ce qui faisait 80 km et paraissait beaucoup. Donc je suis allé en Papouasie-Nouvelle-Guinée, considérée comme une île de l’Océanie et j’ai nagé en longeant la côte jusqu’à arriver en Indonésie, donc on considère qu’on entre en Asie. Quand j’ai nagé entre les États-Unis et la Russie, je n’ai pas nagé encore une fois 80 km dans une eau à 4 degrés, j’ai nagé entre deux îles: une américaine et une russe. Donc symboliquement, j’ai rallié l’Asie à l’Amérique. C’est ce genre de concept qu’on essaie d’appliquer dans les incentives: il faut réfléchir différemment, sortir de sa zone de confort et innover.

On voit beaucoup aujourd’hui de politiciens et d’hommes d’affaires célèbres qui sont très sportifs. Le milliardaire Richard Branson de Virgin en est le symbole. Est ce que les challenges sportifs sont un élément clef de leur réussite ?

Je trouve cela bien qu’un businessman ou un manager fasse du sport car cela permet d’apprendre à écouter son corps et de passer du temps avec soi-même. Par exemple, lors d’un de mes défis sportifs, j’ai été piqué par une méduse dont le venin est aussi puissant que celui d’un cobra et j’ai dû nager 46 minutes de plus avant d’être transporté à l’hôpital. Ce qui m’a permis de nager ces 46 minutes, avec un avant bras paralysé et de grosses douleurs, c’est que je connaissais mon corps et que je savais que j’avais encore une marge de manœuvre après qu’il ait tiré la sonnette d’alarme. C’est donc parfaitement applicable à l’entreprise en cas de crise par exemple.
La pratique du sport permet aussi d’apprendre que l’on n’est rien sans les personnes qui nous entourent. Lorsque je fais des défis sportifs, je dépends de la nature, et donc j’apprends la patience, et surtout j’ai toute une équipe de spécialistes autour de moi. C’est le médecin par exemple qui va me dire si je ferai de l’hypothermie et me préviendra des dangers… On retrouve là le concept des bonnes pratiques managériales qui consistent à s’entourer de personnes spécialistes, meilleures que soi dans certains domaines, à qui l’on doit savoir déléguer, un bon manager étant un chef d’orchestre.

« Il faut réfléchir différemment, sortir de sa zone de confort et innover »

Le sport apporte donc cette notion d’esprit d’équipe essentielle à la bonne marche de l’entreprise…
Le sport permet de renforcer l’esprit d’équipe et d’entraide. Par exemple, le swimrun se pratique en binôme donc on comprend que sans l’autre, on ne peut pas réussir. Mais même lorsqu’on pratique un sport individuel, on se rend compte que sans son concurrent cela n’a pas de sens de faire ce que l’on fait, parce qu’il nous pousse en avant. Si je suis champion d’Afrique de lancer de poids et que je lance à 17 mètres, si je n’ai pas quelqu’un qui me tâtonne à 16 mètres, je lancerai toute ma vie à 17 mètres, je serai champion d’Afrique pendant 10 ans et j’en serais heureux. J’ai donc besoin de ce concurrent pour améliorer mes performances. Cet exemple est parfaitement applicable dans le monde de l’entreprise.
Le sport permet aussi, lorsqu’on fait un mouvement à répétition comme une technique de nage… d’intégrer le mouvement, pas par cœur mais par corps, et de pouvoir opérer le travail mental dont on a besoin dans les moments difficiles, de douleur physique par exemple. Il en est de même dans le monde de l’entreprise: si on ne prépare pas les choses et si on ne crée pas des automatismes, on reste focalisés sur les difficultés au lieu de réfléchir à l’atteinte de ses objectifs.

Mais à force de défis, est ce qu’on n’a pas toujours envie d’aller plus loin ?
Toujours. Même en entreprise, lorsqu’on a atteint un objectif, on repart toujours de zéro et il faut toujours de nouveaux objectifs. Lorsque dans mon cas j’ai couru un semi-marathon, un autre semi-marathon ne me suffisait plus il fallait que je fasse un marathon. Ensuite j’ai traversé le détroit de Gibraltar, puis la mer rouge avec 8h30 de nage… On veut toujours plus.

Justement, votre dernier challenge a été d’organiser le Swimrun au Maroc. Des équipes d’entreprises marocaines ont elles relevé le défi ?
Oui nous avons des entreprises qui participent. C’est le cas de notre sponsor officiel qui a 5 équipes, Wafasalaf qui en a 4, une équipe de AXA et enfin Fedex, qui est sponsor, en a une aussi.
Le swimrun est vraiment idéal pour le team building parce qu’on voit vraiment que sans l’autre on n’est rien. Il faut être 2 par 2, c’est la règle principale. Ne pas se séparer de plus de 10 mètres en natation, pas plus de 50 à 100 mètres en course à pied et il faut toujours être ensemble sinon on est disqualifiés. Cette règle a été créée initialement lors des championnats du monde car même s’il y a toute une logistique de sécurité, des cayaks et toute une organisation, la première personne qui te vient en aide c’est toujours ton binôme.

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