Sur le plateau de l’Info en Face du lundi 24 janvier, Ryad Mezzour, le ministre de l’Industrie et du Commerce, a eu le verbe haut. Entre interpellation et mise en garde, il a présenté les grandes lignes de la nouvelle politique industrielle et commerciale du Royaume.
Incisif ! C’est le mot qui caractérise au mieux Ryad Mezzour, le ministre de l’Industrie et du commerce sur le plateau de Matin TV ce lundi 24 décembre. Dans l’émission “L’info en Face”, le ministre n’a été ni timoré, encore moins intimidé face à un Rachid Hallaouy toujours poignant.
Tant sur les sujets chauds, que sur les complaintes des acteurs du secteur remontées par le journaliste, Ryad est resté droit dans ses bottes. Démarrant sur la question de son appréciation sur les cent premiers jours, le ministre se dit pour sa part satisfait. « Pas facile d’avoir des résultats en 100 jours, mais nous en avons de tangibles », a-t-il déclaré. Au nombre de ces résultat : « la protection sociale avec la couverture de 11 millions de personnes ». Aux grognes de certaines catégories sociales, Ryad Mezzour brandit l’adhésion de certaines autres. Citant l’adhésion de 300 000 commerçants « sans aucune contestation ni protestation », sonne comme un cinglant désaveu aux détracteurs.
Solidarité ministérielle
Concernant les critiques sur la sortie d’Akhannouch qui a esquivé « le direct », Mezzour a dégainé un soutien sans équivoque. Direct ou pas, l’homme a été « naturel, technique, professionnel », par-dessus tout « honnête et intègre », trouve Mezzour. Égratignant au passage l’attitude controverse du PJD à l’époque. « On avait un Chef de Gouvernement qui assumait la semaine et se reniait le week-end ». Toujours dans ce registre de soutien au “capitaine“ Akhannouch, il n’hésite pas à intervenir contre toute déformation de ses propos. Réfutant qu’il se soit défilé sur sa responsabilité dans la réouverture des frontières.
Expliquant que « les trajectoires d’évolution de la pandémie n’ont pas toujours respecté les modèles prescrits », il soutient que le gouvernement s’en tienne à l’avis du Comité experts avant de statuer sur la nécessité de rouvrir ou non les frontières à l’échéance du 31 janvier prochain. Toujours d’après lui, la réouverture en l’état actuel des choses peut être un couteau à double tranchants. Elle pourrait, si précoce, donner un semblant de liberté qui risquerait de céder la place, si les cas flambent, à plus de restrictions et de privations. Aussi invite-t-il ses concitoyens à faire confiance au Chef de gouvernement et son équipe.
La relance économique en marche
« Notre économie est relancée sur tous les secteurs », a clamé le ministre de l’Industrie et du Commerce. Pour preuve, il affirme que « 40% des emplois industriels perdus pendant la crise ont tous pratiquement été récupérés ». Et sur le plan national, où la perte d’emploi liée à la crise sanitaire est estimée dans l’ordre de 600 à 700 000 emplois, Mezzour soutient sans sourciller que 2/3 ont repris du service.
A lire: Investissement industriel : Face au patronat, Ryad Mezzour expose sa vision
S’exprimant sur la baisse des IDE, Mezzour souligne que « les tendances sont quand même bonnes ». Et de rajouter : « dans un monde où les chaînes de valeur et les investissements se replient, et où les pays mobilisent leurs propres investissements pour s’auto-relancer, le Maroc tire bien son épingle du jeu ». Pour lui, il ne fait aucun doute que les choses reviendront en l’état beaucoup plus rapidement. Ses raisons : « le Maroc, l’une des bases les plus compétitives du monde est dans les radars ».
Un tissu industriel dynamique
Dans son “plaidoyer“, Mezzour s’est félicité de la performance du tissu industriel local. « On est capable de tout fabriquer, pas seulement des masques », a-t-il dit. Et sur ce point, le ministre a précisé qu’en l’espace de 15 mois « la task-force de souveraineté industrielle » a recensé 810 projets industriels et en a retenu 731. Ces projets qui devraient générer plus de 130 000 emplois vont nécessiter plus de 35 MMDH d’investissement. En prévision, le chiffre d’affaires attendu serait de 96 MMDH, dont 60% à l’export. Et la bonne nouvelle qu’apporte Mezzour, c’est que « 90% des capitaux d’investissement sont marocains ».
À l’en croire la majorité de ces projets sont en phase de réalisation. « 70% ont acquis le terrain et sont en phase de construction ». Comme quoi la politique de substitution initiée par MHE marche. Détail important, Mezzour a précisé qu’il est désormais question de souveraineté industrielle en lieu et place de politique de substitution. Cela sur la base des nouvelles orientations de Sa Majesté visant à répondre aux besoins actuels et futurs du pays. Ainsi « cette souveraineté industrielle intègre les dispositifs médicaux, l’agro-industrie pour répondre plus à la demande nationale, les puces électroniques pour résorber des pertes se chiffrant dans les 10 -15 MMDH à cause de la pénurie des semi-conducteurs, etc. ».
Augmentation des denrées alimentaires
Interrogé sur la hausse des prix à la consommation, le ministre a fait une marge de concession. « on ne produit pas et on ne transforme pas tout », a-t-il reconnu. Toutefois il a défendu que les exportations agroindustrielles ont surpassé les produits de l’amont agricole. Ce qui est pour lui une augmentation à ne pas minimiser, bien que cela n’occulte pas les ruptures de chaînes.
La réciprocité pour arrêter le déficit
Aussi, la balance commerciale déficitaire du Royaume avec ses partenaires économiques a-t-elle été abordée. Là-dessus, le ministre a dénoncé le jeu trouble des partenaires du Maroc dans les Accords de libre-échanges. Alors que le Maroc ouvre grandement ses frontières pour accueillir leurs produits, ces derniers ne lui renvoient pas l’ascenseur. Refusant le rôle de « naïf de la mondialisation », le Maroc entend dorénavant appliquer la réciprocité. Une nette fermeté face aux pratiques déloyales de pays comme l’Egypte. La conséquence immédiate de cette réciprocité serait à l’origine des récriminations portées contre le Maroc.
Pour ceux qui se plaignent des délais et procédures de contrôle, Mezzour s’est voulu on ne peut plus clair : « je suis en charge de faire en sorte que ce qui rentre chez moi respecte des normes ». De plus « seulement 8% des importations sont soumises à des procédures de contrôle n’excédant pas trois jours ». Comme solution à ces fâcheuses situations, le ministre a invité partenaires et importateurs à faire les choses à la loyale. Outre ces quelques déséquilibres, le ministre pense que : « les ALE sont une opportunité ».
Le ministère : un rôle pivot !
Le ministre est revenu sur certains autres sujets poignants comme la couverture des intrants demandés par des acteurs. Il a signifié qu’il existe des mécanismes d’accompagnement en ce sens. Par ailleurs, coupant net les critiques il a déploré qu’il ne pouvait se substituer aux chaînes de création de valeur privées. Ce en dépit du rôle, tout de même pivot joué par son ministère. Autre sujet, la décarbonation. Là-dessus, le ministre croit que « c’est la meilleure chose qui puisse nous arriver ». L’orientation stratégique prise par le Maroc sous l’impulsion du Roi, le potentiel inouï niveau solaire et éolien, le savoir-faire technique acquis, sont autant de facteurs qui fondent sa « certitude ». Quant aux critiques relatives à la rigidité du Dirham marocain, le ministre n’en fait pas cas. Fustigeant la volatilité monétaire de pays comme la Turquie, il trouve que « c’est du dopage malsain ».
Sur le même sujet: Ryad Mezzour, un industriel chevronné au ministère de l’Industrie et du Commerce
Pour clore, Mezzour a donné des explications rationnelles concernant la répartition équilibrée des investissements industriels sur l’ensemble du territoire, et rassuré quant à l’industrie 4.0. Stipulant sur ce dernier point qu’une moyenne de 45% du tissu industriel marocain est robotisé. Effet d’annonce ou pas, une marque de voiture 100% marocaine fera l’objet d’une annonce future, a fait savoir le ministre.
En somme c’est un Ryad Mezzour extrêmement énergique qui a brillé de mille feux lors de cet entretien. Un dynamisme et une énergie que les « stakeholders » du tissu industriel attendent jusque-là de voir imprimer sur le tissu industriel et commercial marocain.
NGY