Mbarka Bouaida, présidente de l’Association des Régions du Maroc
Mbarka Bouaida, présidente de l’Association des Régions du Maroc

À l’occasion de la deuxième édition des Assises Nationales de la Régionalisation Avancée, organisée à Tanger sous le thème « La régionalisation avancée : entre les défis d’aujourd’hui et de demain », nous avons rencontré Mbarka Bouaida, présidente de l’Association des Régions du Maroc. Cet échange a permis d’aborder les principaux défis liés à l’attractivité économique des régions, le financement des projets d’investissement, ainsi que leur rôle crucial dans des enjeux nationaux tels que la transition énergétique, la gestion de l’eau et la transformation numérique.

Quels sont les principaux défis dans lactivation des compétences des régions pour améliorer leur attractivité économique ?

En se référant aux défis mentionnés dans le  Message de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l’Assiste, adressé aux participants de la deuxième édition des Assises de la régionalisation avancée, notamment le 2ème défi qui porte sur la précision et l’opérationnalisation des compétences des collectivités territoriales et le 5ème défi concernant l’amélioration de l’attractivité des régions dans un contexte de compétitivité mondiale croissante, on peut faire ressortir qu’il y a certainement des défis sous-jacents en réponse à votre question sur l’activation des compétences des régions pour améliorer leur attractivité économique.

Il s’agit, en effet, de la mise en œuvre, avec l’efficacité requise, des compétences propres et partagées de la région en la matière, en l’occurrence le soutien aux entreprises, la domiciliation et l’organisation des zones d’activités économiques dans la région, l’aménagement des routes et des circuits touristiques dans le monde rural, la promotion de l’économie sociale et des produits régionaux, la formation professionnelle, la formation continue et l’emploi, l’amélioration de l’attractivité des espaces territoriaux et le renforcement de la compétitivité, la promotion du tourisme ; etc.

Comment peut-on assurer la coordination entre la décentralisation et la déconcentration pour soutenir l’investissement ?

Je vous rappelle que le rapport du Nouveau Modèle de Développement a lancé un appel pour un « Maroc des Régions », pour accélérer l’achèvement de la mise en œuvre du chantier de la régionalisation avancée en concomitance avec celui de la déconcentration administrative effective, dans le but d’assurer la convergence et la performance des politiques publiques au niveau des espaces territoriaux. Il s’agit des deux piliers de la régionalisation avancée. Le succès de l’un dépend de celui de l’autre.

Ceci est particulièrement vrai si l’on sait que leur convergence garantit l’efficacité de la régionalisation avancée et le renforcement des mécanismes de coopération entre les services déconcentrés de l’État et les collectivités territoriales, ainsi que l’adaptation des politiques publiques aux spécificités régionales, en tenant compte des particularités locales lors de leur élaboration, exécution et évaluation, tout en assurant leur cohérence au niveau des territoires.

Quelles sont les solutions disponibles pour financer les projets d’investissement des régions ?

En évoquant la question du financement des projets d’investissements des régions, il est possible de distinguer des solutions dites classiques et autres, qui peuvent être qualifiées d’innovantes. Les premières concernent les ressources propres (fiscales et non-fiscales), les ressources affectées de certains impôts de l’Etat (5% du produit de l’impôt sur le revenu, 5% du produit de l’impôt sur les sociétés et 20% du produit de la taxe sur les contrats d’assurance) et des ressources péréquatées (la création de deux fonds en faveur des régions.

Le premier est destiné à la résorption des déficits en matière de développement humain, d’infrastructures et d’équipements. Le second vise une répartition équitable des ressources, en vue de réduire les disparités entre les régions), les financement par les contrats État-Régions, les produits des emprunts autorisés.

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Par ailleurs, d’autres solutions innovantes peuvent être réfléchies, telles que les contrats de partenariat public-privé (PPP), la création des Sociétés de développement régional en partenariat avec le secteur privé, le financement par la coopération locale, le financements par la coopération décentralisée, le financements par le marché financier à travers les émissions obligataires ou la part et titres de créances émis par les fonds de placements collectifs en titrisation.

Comment les régions vont-elles faire face au stress hydrique et garantir l’approvisionnement en eau ?

Il faut d’abord rappeler que la région est attribuée de compétence propres et partagées en matière de politique de l’eau, l’élaboration d’une stratégie régionale d’économie de l’eau et la préservation des ressources en eau.

D’autant plus que la Région est conviée à répondre efficacement et en concert avec les départements concernés à l’appel de SM le Roi, qui a bien rappelé à tous les acteurs que l’un de ces défis majeurs est la problématique de l’eau, qui ne cesse de se complexifier du fait de la sécheresse, de l’impact du changement climatique et de la croissance naturelle de la demande.

Pour affronter ce défi il est important de rattraper le retard accusé dans la réalisation de certains projets programmés dans le cadre de la politique de l’eau où la contribution des région pourraient être significative, notamment en mettant en œuvre les recommandations ressorties de la 2ème édition des Assises de la régionalisation avancée en la matière.

Quelles sont les priorités de la transformation numérique des collectivités pour renforcer la gouvernance et la participation citoyenne ?

Il faut rappeler que le chantier de transformation numérique des collectivités territoriales s’inscrit dans l’esprit des dispositions constitutionnelles, les lois organiques relatives aux collectivités Territoriales, ainsi que plusieurs autres lois, notamment la loi n° 54-19 portant charte des services publics, la loi 55.19 relative à la simplification des procédures, et la loi n° 31-13 relative au droit d’accès à l’information.

L’objectif de ce chantier est de digitaliser les métiers fonctionnels et opérationnels des collectivités territoriales (police administrative, prestations administratives, finances locales, fiscalité, ressources humaines, etc.) afin d’améliorer la qualité des services rendus aux citoyens et le climat des affaires aux entreprises.

C’est pourquoi, il est bien recommandé par les Assises de se focaliser sur deux priorités : d’une part, l’élaboration et la mise en œuvre des schémas directeurs de transformation numérique au niveau des Régions, et d’autre part, la création de structures de sociétés mixtes pour profiter de l’innovation du secteur privé en la matière.

Comment les régions peuvent-elles contribuer à la transition énergétique et à l’adoption des énergies renouvelables à l’échelle locale ?

Je rappelle également que la région est attribuée de compétences propres en matière de politique énergétique, à savoir l’élaboration d’une stratégie régionale d’économie de l’énergie et la promotion des initiatives relatives aux énergies renouvelables, ainsi que de compétences partagées en matière d’énergie.

Ce faisant, plusieurs PDR ont adopté des projets visant à réaliser la transition énergétique et à l’adoption des énergies renouvelables à l’échelle locale. A titre d’illustration, les provinces du Sud du Maroc sont aujourd’hui au cœur d’un vaste mouvement de transition énergétique qui transforme le paysage de cette zone et réaffirme l’ambition du Royaume pour un avenir durable. En 2024, la capacité installée des énergies renouvelables a déjà atteint 5,3 GW, représentant 44,3% de la capacité globale installée au Maroc. Ces chiffres illustrent bien que les provinces du Sud du Maroc sont un exemple de développement durable, capable d’inspirer d’autres régions du pays.

Quel rôle l’Association des Régions du Maroc joue-t-elle dans la promotion des partenariats nationaux et internationaux pour soutenir le développement régional ?

Depuis sa création, l’Association des Régions du Maroc aspire à participer activement et de façon structurée, pour le compte des Régions du Maroc, à la réussite du chantier de régionalisation avancée et au renforcement du rôle de la région en tant qu’acteur essentiel pour un développement durable des territoires et une gestion publique territoriale efficace.

Pour ce faire, il se fixe pour objectifs essentiels de veiller à la coordination entre les régions, faire connaitre leurs réalisations et renforcer les relations de partenariat entre elles, rechercher les appuis matériels et financiers au Maroc et à l’international au profit des régions, et consolider le rôle des régions dans le développement économique et social.

Propos recueillis par Rachid Mahmoudi

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