Y croire encore malgré les apparences
Aujourd’hui, il n’est plus permis de parier au pile et face quand il s’agit de l’avenir d’un secteur qui a fait la fierté de l’industrie nationale des décennies durant à savoir le Textile-Habillement.
Mais plutôt reprendre confiance après une rupture, c’est-à- dire se reconstruire et reprendre les choses en main.

Comment ? Toute la question est là.

Aujourd’hui l’enjeu pour le Maroc est de savoir se positionner là où sa maturité concurrentielle et ses avantages compétitifs lui procurent une longueur d’avance par rapport à ses concurrents.
La quasi-majorité des études réalisées dans ce sens-là recommandent de se tourner davantage vers le Sourcing Express, c’est-à- dire développer l’offre à court terme à
condition que le Maroc modernise son offre.

‘‘Bon nombre d’experts conseillent alors vivement de muter vers la spécialisation de confectionneur co-concepteur’’

Autrement dit, s’atteler à monter en créativité, réactivité et fiabilité dans cette stratégie de sous-traitance de proximité.
L’objectif est de capitaliser sur les performances réalisées au niveau de la confection et de rompre avec cette culture textile.
Le nouveau paysage concurrentiel mondial veut que la plate-forme Maroc soit destinée aux approvisionnements rapides eu égard aux stratégies des donneurs d’ordres à l’épreuve de la crise mondiale.
D’ailleurs, le positionnement des confectionneurs marocains en a fait ses preuves jusqu’alors.
Sauf qu’avec la domination progressive de la co-traitance et du négoce, les règles du jeu sur le champ de bataille ont changé.
Bon nombre d’experts conseillent alors vivement de muter vers la spécialisation de confectionneur co-concepteur.
À plus longue échéance, tout se jouera sur ce terrain plus exactement indépendamment des coûts de production et des fluctuations de la consommation essuyant ces temps-ci un coup de froid.
Et le dernier mot reviendra à celui qui détient le pouvoir de la mode et du fast-fashion.
C’est dire livrer un produit clef en main d’un apport créatif sans commune mesure avec l’offre concurrentielle.
Question donc de vie ou de disparition, d’autant plus vrai que la position concurrentielle s’est effritée tout au long des dernières années de sorte que le secteur est entré dans une phase d’inquiétude.
«Les sociétés cherchent des sources où ils ont le tissu, les fournitures, les capacités de confection, d’ennoblissement, pour les pantalons, pour les pulls, pour les vestes», note une étude sur ‘’le positionnement des confectionneurs marocains vu par les donneurs d’ordre européens’’ effectuée par l’institut français de la mode(IFM).

‘‘En termes de parts de marché, on constate donc le déclin d’année en année de l’importance relative du Maroc.’’

Le Maroc n’est plus en mesure de fournir une offre globale et intégrée Tissus-confection.
Pour bien comprendre ce revirement de tendances, il suffit de remonter le fil du temps en analysant les données chiffrées de cette activité qui pèse aujourd’hui pour près de 7% du PIB et 24 % des exportations de biens.
La part du Maroc dans les exportations mondiales d’habillement a chuté de 1,16% en 2004 à 0,78% en 2010.
Plus encore et dans son marché privilégié, le Maroc a perdu des parts dans les importations européennes de vêtements tombant ainsi à 3,2% en 2011 contre 4,3% en 2004.
En termes de parts de marché, on constate donc le déclin d’année en année de l’importance relative du Maroc.
La part du marché habillement marocain dans l’Union européenne est passée de 4,59% en 2005 à 3,35% en 2010 au profit d’autres pays asiatiques tels la Chine ou ceux méditerranéens comme la Turquie ou encore la Tunisie.
Au cours de la période 2000- 2005, les Turcs ont réussi à surclasser le Maroc (premier fournisseur de la France en vêtements maille).
En effet, en 2005 les commandes de l’Hexagone en provenance de la Turquie se sont élevées à 505 millions d’euros d’importations, contre 332 millions pour le Maroc.
Le déclin des approvisionnements en provenance de notre pays a commencé à se faire sentir à partir de 2001 pour s’accentuer davantage depuis 2005 avec le démantèlement des quotas.
C’est ainsi que les pertes de parts de marché dans les importations européennes sont estimées à 0,7 point pour la seule année de 2005.
L’analyse des importations de l’Union Européenne au cours de la période 2000- 2005 montre que le Maroc a perdu du terrain voyant ainsi sa part glisser à 11,7% en 2005 contre 13,7% il y a cinq ans.
Les contre-performances du secteur textile-habillement ne trompent plus personne surtout lorsqu’on sache que la part de cette activité, à l’origine de près de 175.000 emplois, soit 40% des emplois industriels nationaux, dans l’offre exportable de biens est tombée à 16% en 2011 contre 24% en 2007.
Avec la crise bancaire et financière et la contraction des volumes qui va avec, le Maroc a vu le total des exportations vers l’Union européenne se fragiliser davantage.
En 2012, les ventes à l’étranger se sont situées à 29,7 milliards de dirhams eu lieu de 31,4 en 2007.
Les expéditions nationales vers notre premier partenaire commercial se sont établies à 28,3 milliards de dirhams contre 30,5 milliards.
Avec le reflux observé, fautil le souligner, la part de l’Espagne dans les ventes nationales a enregistré une tendance plus positive que l’ensemble des partenaires.
La péninsule ibérique a devancé la France au rang de premier client du Maroc.
Les livraisons vers le client européen privilégié ont culminé à 11,7 milliards de dirhams en 2012 contre 11,2 milliards en 2007.
Notre voisin traditionnel qui était au coude à coude avec la France se voit ainsi capter la part de lion avec plus 42% des exportations marocaines.
Entre 2001 et 2007, les importations espagnoles en provenance du Maroc ont été multipliées quasiment par 2,5.
‘’Le dynamisme des livraisons espagnoles est notamment le fruit du développement du groupe INDITEX dont le modèle est basé sur le fast-fashion(…) Sous l’impulsion du dynamisme de ZARA et MANGO, le Maroc valorise ainsi son avantage géographique vis-à- vis du marché espagnol’’, souligne-t-on.
À terme, cette tendance ne sert en rien le secteur du textile – habillement, du moment que l’érosion de la position du Maroc au marché européen continue avec l’afflux massif du géant asiatique qui a écrasé toute concurrence; la Chine s’accapare aujourd’hui 44% du total des importations de l’UE.
Mais pas seulement.
La Turquie qui grignote chaque jour plus de parts demeure ultra dominante.
Les importations européennes d’habillement en provenance de la Turquie en 2011 ont flirté avec les 8,2 milliards d’euros contre seulement 2,1 milliards pour le Maroc.
Bien que la compétitivité- prix balance du côté du Maroc.
Les coûts horaires de main-d’oeuvre observés en 2011 dans le secteur textile s’établissaient à 2,9 dollars tandis que ceux de la Turquie sont proches de 5 dollars. Mis à part ces écarts, toute comparaison de compétitivité hors prix ne serait qu’une perte de temps.
D’ailleurs, les points faibles du secteur ne sont pas à dénombrer.
À commencer par la faiblesse criarde des investissements maroco-marocain.
Certes, fouettés par les coups de la concurrence farouche et les ondes de choc de la crise, mais aussi, faut-il le soulever, tentés par le profit rapide, la majorité des Textiliens ont migré vers d’autres secteurs essentiellement l’immobilier.
Et c’est la concurrence qui a su profiter de ce retrait, puisque plus de 70% des vêtements des Marocains sont issus de l’import.
À cette invasion vient s’ajouter l’informel.
La gravité de ce monstre se mesure à travers la part des Souks, foires et galeries marchandes dans les circuits de distribution, qui tourne au tour de 90%. Surgissent ensuite les failles liées à la qualité du produit marocain

‘‘La gravité de l’informel se mesure à travers la part des Souks, foires et galeries marchandes dans les circuits de distribution, qui tourne au tour de 90%’’

qui manque de fiabilité et de précision, selon les résultats d’une étude commanditée par l’AMITH (Association marocaine des industries du textile et de l’habillement).
Sans parler des faiblesses de créativité, rapidité, de services et techniques utilisées.
Sur le registre des délais de livraison, le Maroc est loin d’être un cas d’école en ligne avec l’insuffisance d’infrastructures en logistique et transport.
Sont taxées du doigt également le niveau faible de qualification et des compétences de même que le haut niveau d’illettrisme.
Interrogés sur les faiblesses de l’offre Maroc, bon nombre de donneurs d’ordre listent la lourdeur des pratiques administratives.

‘’Le mode de gestion et la complexité des procédures administratives, ajoutées à la multiplicité des acteurs, affectent négativement le bon fonctionnement des entreprises existantes et entrave les nouveaux investissements dans la filière’’

, peut- on lire dans une étude de la Direction des études et des prévisions financières (DEPF).
D’autres contraintes, cette fois-ci d’ordre financier, sont appelées à compromettre davantage la compétitivité de la filière du textile- habillement pour ne citer que les risques liés à la parité eurodollar ou encore la pression de la fiscalité locale caractérisée par sa complexité et le nombre élevé de ses taxes (patente, taxe urbaine, taxe d’édilité…).

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