Perspectives de la souveraineté énergétique

Durant l’Industrie Meeting Morocco de 2024, un panel, très enrichissant, parlant de la souveraineté énergétique au Maroc, et de ses nombreuses perspectives a vu la participation d’experts dans le domaine, des directeurs et responsables d’entreprises leaders en la matière au Maroc, qui ont su partager leurs réflexions à ce sujet.

Driss Nahya : Directeur Général de Polluclean a démarré ce panel, en annonçant que les déchets au Maroc sont de 8M de tonnes de déchets ménagers, 7M de tonnes de déchets industriels dont 2M qui contiennent un danger. Il a, ainsi, indiqué que le business-model de Polluclean est basé sur le savoir : « Nous utilisons une matière première, qui est les déchets, et nous la transformons, avec les savoirs que nous avons développés, en d’autres produits qui peuvent être utilisés dans l’industrie. »

Pour M. Driss Nahya, la souveraineté se réfère à la capacité d’un pays à assurer son approvisionnement énergétique de manière autonome, durable, résiliente, qui réduit la dépendance aux importations et qui augmente sa résilience face aux chocs extérieurs. « Le Maroc, vous le savez, importe environ 90% de ses besoins énergétiques, principalement sous forme de combustibles fossiles tels que le pétrole et le gaz naturel. Cette forte dépendance expose le pays à la situation des prix internationaux et aux risques géopolitiques », a annoncé le directeur.

Cependant, le Maroc a fait beaucoup de réalisations, et ce dans l’énergie solaire, les énergies éoliennes, les énergies hydrauliques. Il a également mis en place une stratégie et une politique pour la souveraineté énergétique.

M. Nahya a ensuite évoqué les défis auxquels le Maroc fait face. En effet, le premier défi est d’ordre financier, vu que la transition vers une énergie durable nécessite des investissements considérables pour financer les projets d’énergie.

Comment la gestion des déchets contribue à la souveraineté énergétique ?

Driss Nahya a répondu à cette interrogation : « En fabricant le combustible solide de réparation. C’est un combustible qui est fabriqué à partir des déchets qui ne peuvent pas être valorisés sous forme de matière. Le potentiel au Maroc est énorme », il a ajouté : « on peut fabriquer, à peu près, 5M de combustibles de substitution qui peuvent être utilisés, aujourd’hui, soit dans des cimenteries soit les centrales thermiques. »

Ce combustible peut remplacer le pétrole, que l’on paye en devise. Le gap potentiel du combustible de substitution est la réduction de la dépendance aux importations de combustibles fossiles, ce qui contribue directement à la souveraineté énergétique du pays. Il permet, ainsi, de diminuer les coûts énergétiques pour les industriels et ça permet également de valoriser les déchets locaux, en réduisant le volume des décharges.

Par ailleurs, les combustibles de substitution permettent de créer des emplois. M. Nahya a, aussi, indiqué que PolluClean produit annuellement 40.000 tonnes de combustibles de substitution qui est utilisé dans la cimenterie.

Dans sa conclusion, Driss Nahya a invité à « agir » ensemble pour un avenir plus durable et pour une économie forte.

En parlant de la souveraineté énergétique, M. Ali El Harti, président de la FENELEC a souligné que la souveraineté industrielle est étroitement liée à la souveraineté énergétique, il a ajouté : «Le prix, le coût d’un produit, la compétitivité d’une entreprise… Et l’élément qui fera qu’une entreprise marchera ou pas, c’est sa capacité à être compétitive. Et dans cette compétitivité, on mettra le coût de l’énergie». Il a, également, évoqué la problématique de la décarbonation pour les exportateurs en Europe. « Le kilowatt-heure au Maroc, l’empreinte carbone est de 700 grammes. Alors que le standard est à 100 grammes », a précisé le panéliste. Ainsi, les industriels, ne pouvant pas payer la taxe carbone, ont pour unique choix de chercher l’énergie verte. L’énergie renouvelable offre, aujourd’hui, des prix intéressants. Et même si cette énergie est liée au soleil, M. El Harti a bien précisé que « la bonne nouvelle, c’est que nous arrivons aujourd’hui à avoir des systèmes de stockage batterie extrêmement performants, à des prix super intéressants ».

Quel écosystème le Maroc est-il en train de créer pour les batteries ?

Ali El Harti a indiqué que le FENELEC a des discussions avec le ministère d’industrie et du commerce afin de mettre en place un écosystème pour les batteries.

S’exprimant sur le fait que l’Europe est à la recherche d’une forme de souveraineté, M. El Harti a dit que « le Maroc a une vraie opportunité à aller saisir pour être un fournisseur d’énergie pour l’Europe, demain. ».

En répondant à la réflexion du ministre de l’industrie, plus tôt durant la cérémonie, sur la gouvernance et la création d’emplois, M. Kassem Benhaddou : Directeur Afrique du Nord et de l’Ouest – Eaton Electric a déclaré : « Eaton a toujours encouragé la gouvernance énergétique, qui est importante pour la gouvernance industrielle ».

« Comment pouvons-nous, en tant que marocains, aider une entreprise comme Eaton à investir au Maroc ? »

C’est Kassem Benhaddou qui s’est posé cette question, et il y a répondu. En effet, bien que le Maroc est un petit pays par rapport aux grands pays de l’Union Européenne, par exemple, M. Benhaddou invite à rendre le Maroc un hub pour l’export en Afrique et en Europe du Sud. Il y a toutes les plateformes logistiques pour cela, à l’instar de Tanger Med. « Nous même, on cherche à dire à nos patrons, investisseurs américains : venez encore plus au Maroc… On doit les convaincre, et pour cela on doit avoir les ressources : de bons ingénieurs, qui sont capables de travailler chez Eaton, qui sont formés au Maroc, qui sont capables d’avoir cette autonomie d’ingénierie pour produire et pour assembler et délivrer en Europe, en Chine et aux États-Unis un produit Made in Morocco », a indiqué Kassem Benhaddou. Il a, également, souligné le fait que le Maroc a les plateformes pour exporter, que ça soit en Afrique ou en Europe du Sud, des solutions Made in Morocco, en déclarant que 5% du portefeuille de Eaton est produit au Maroc. Parmi ces produits, des recharges de véhicules électriques Made in Morocco. Ainsi, et pour conclure, M. Kassem Benhaddou a exprimé son souhait pour que le Maroc et les pays de la région puissent produire tout ce dont ils ont besoin, et ce afin de développer l’infrastructure africaine en termes de ports, d’aéroports, de malls, d’hôtels de stades de football. « On a besoin d’énergie électrique, on a besoin d’infrastructures et on veut que ce soit du Made in Morocco. Mais on va tous s’y mettre pour y arriver et faire la publicité de ce Made in Morocco dans la gouvernance industrielle. », a-t-il conclu.

Haroun El fassi, qui représente Maghreb Steel a annoncé que Maghreb Steel utilise l’énergie éolienne, actuellement, à 100%. « Il faut prendre en compte les différentes contraintes locales, les industriels, le tissu industriel existant pour pouvoir renforcer cette souveraineté. Si on ne prend pas en compte les contraintes locales dans la rédaction des cahiers de charges, c’est voué à l’échec », a déclaré M. El fassi. Il a donné, comme exemple, la fabrication de l’éolienne pour laquelle il y a une volonté de fabrication locale. Le tissu industriel local a des capacités de fabrication d’acier, mais qui sont limités en largeur, toujours selon M. El fassi, ce qui oblige la sollicitation d’industriels internationaux pour s’implanter. A ce sujet, il a dit : « Si on devrait retenir un seul message, c’est qu’il y a besoin de prendre en compte les contraintes locales dans la rédaction des cahiers de charges, avant de passer aux questions de souveraineté ou de préférence nationale, parce que le prix n’est que la résultante de plusieurs composantes. »

                                                                                                 Manal Boukhal

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