La régulation des cryptomonnaies au Maroc, une opportunité pour dynamiser le marché

Alors que le marché des cryptomonnaies ne cesse de croître à l’échelle mondiale, le Maroc, avec son approche prudente, se trouve à un tournant décisif. Dans cet univers en constante évolution, l’enjeu pour le royaume est de concevoir une stratégie efficace et adaptée, comme le souligne Haroun El Aouad, CTO de Blocreg Solution.

Pourquoi certains pays comme le Salvador ont-ils osé adopter massivement les cryptomonnaies, malgré les mises en garde des institutions financières internationales ? Selon Haroun El Aouad, « ces pays ont vu dans la blockchain une opportunité de sortir des contraintes imposées par des économies traditionnelles dominées par des puissances mondiales. » La nature décentralisée de la blockchain leur a permis de construire un écosystème économique indépendant, avec des retombées économiques positives notables.

Au Maroc, un marché parallèle existe déjà, alimenté par des plateformes peer-to-peer. Bien que non réglementé, il témoigne d’un intérêt grandissant pour les cryptomonnaies. « L’évolution de la blockchain simplifie considérablement la création de portefeuilles et les mouvements de fonds entre comptes, même si ces transactions restent illégales dans le royaume », explique El Aouad. Cette réalité soulève une question cruciale : comment canaliser cet engouement vers un cadre légal bénéfique pour l’économie marocaine ?

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Pour Haroun El Aouad, une approche progressive et bien structurée est essentielle. Il affirme qu’il ne s’agit pas de « légaliser d’un coup la crypto, mais d’implémenter progressivement des technologies liées aux actifs numériques. » Le projet d’e-dirham, une monnaie numérique émise par la Banque centrale, représente selon lui une étape idéale pour initier le Maroc à cet univers tout en limitant les risques. Cette régulation graduelle pourrait permettre au royaume de tirer parti des cryptomonnaies tout en évitant les pièges liés à leur volatilité.

Entre e-dirham et chiffres à vérifier

La stratégie bien réfléchie de Haroun El Aouad pourrait s’appuyer sur le lancement de l’e-dirham pour familiariser les citoyens et les institutions avec les actifs numériques. Le e-dirham, étant une monnaie numérique émise par une autorité centrale, offrirait une sécurité et une stabilité qui permettraient aux utilisateurs de s’initier aux transactions numériques en toute confiance. Parallèlement, il est crucial d’expérimenter des cadres légaux pour les stablecoins et autres cryptomonnaies. Ces étapes permettraient d’échelonner l’adoption des actifs numériques en veillant à réduire leur impact sur l’économie nationale. Haroun El Aouad précise que « l’implémentation progressive, en commençant par les CBDC (monnaies numériques de banque centrale), offrirait une base solide pour expérimenter et comprendre les impacts avant d’aller plus loin. »

Les estimations actuelles sur les flux cryptographiques au Maroc, bien qu’impressionnantes, nécessitent un examen attentif. Des analyses mentionnent un volume de 13 milliards de dirhams en transactions liées à des adresses IP marocaines. Cependant, comme le rappelle El Aouad, « cela ne signifie pas que ces mouvements de fonds proviennent exclusivement de citoyens marocains. Les caractéristiques décentralisées de la blockchain rendent ces données difficiles à interpréter avec précision. » Des études plus modérées estiment le potentiel économique réel du marché marocain autour de 100 millions de dirhams. Ces chiffres montrent un intérêt latent pour la crypto, mais ils doivent être interprétés avec prudence pour ne pas surévaluer ou sous-estimer la réalité.

Benchmarker pour un cadre législatif idoine

Un benchmark international est indispensable pour définir une feuille de route. « Les pays ayant réussi dans ce domaine, comme ceux adoptant les stablecoins ou les CBDC, montrent qu’il est crucial de choisir des cryptomonnaies adaptées aux besoins nationaux », souligne Haroun El Aouad. Par exemple, les stablecoins, dont la valeur est adossée à des actifs réels, peuvent être un outil efficace pour renforcer la stabilité économique.

Pour le Maroc, l’utilisation de chaque type de cryptomonnaie dans un contexte spécifique pourrait répondre aux besoins locaux. Cela implique de développer des solutions adaptées tout en éduquant les citoyens et les entreprises sur les usages et les risques des cryptomonnaies. Cette démarche pragmatique préparerait le royaume à une transition maîtrisée vers un écosystème numérique.

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L’élaboration d’un cadre législatif adapté est l’une des clés de la réussite de cette transition. Le Maroc peut s’inspirer des meilleures pratiques internationales tout en tenant compte de ses spécificités économiques et sociales. Par exemple, la réglementation des stablecoins, dont la valeur est adossée à des actifs réels, pourrait offrir une stabilité économique et un terrain d’expérimentation idéal pour des projets plus ambitieux. L’éducation des citoyens et des entreprises sur les usages et les risques des cryptomonnaies serait également un pilier central de cette stratégie.

Un potentiel immense à exploiter

En embrassant cette révolution numérique de manière structurée, le Maroc peut non seulement réguler le marché des cryptomonnaies, mais également en tirer parti pour dynamiser son économie. Haroun El Aouad affirme que « avec une vision claire et des étapes bien définies, le royaume a les moyens de devenir un acteur clé dans l’univers des actifs numériques. » La mise en place de partenariats avec des entreprises technologiques internationales pourrait également accélérer ce processus et apporter des avantages significatifs en termes de transfert de connaissances et de technologies.

Il ne fait aucun doute que le virage réglementaire qu’amorce le Maroc pourrait bien être le levier nécessaire pour favoriser un usage harmonieux des cryptomonnaies. Avec une stratégie bien définie, une régulation progressive et un cadre législatif robuste, le Maroc pourrait non seulement renforcer sa position économique, mais aussi jouer un rôle pionnier dans le domaine des actifs numériques en Afrique et au-delà. Cette transformation, si elle est menée à bien, pourrait offrir des opportunités inédites pour les entreprises locales et contribuer à l’essor économique du royaume

L’avenir des cryptomonnaies au Maroc dépend, en somme, de la capacité du pays à adopter une approche structurée et progressive. En s’appuyant sur des initiatives comme l’e-dirham, le royaume peut établir une base solide pour l’intégration des actifs numériques tout en minimisant les risques. L’éducation et la sensibilisation des citoyens, ainsi que l’élaboration de cadres législatifs adaptés, seront essentielles pour assurer une transition en douceur vers une économie numérique. Si le Maroc parvient à naviguer avec succès dans cet environnement complexe, il a le potentiel de devenir un cas d’école en matière de régulation et d’adoption des cryptomonnaies, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour son économie et ses citoyens.

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