Suite aux conséquences de la pandémie du COVID-19, le Groupement des Industries Aéronautiques et Spatiales (GIMAS), regroupant 142 Entreprises, lance une réflexion sur l’avenir de l’Aéronautique au Maroc.
Impact du COVID-19
Opérant dans une configuration de supply chain mondialisée, le secteur aéronautique est directement impacté par la crise des opérateurs de l’aviation : Compagnies aériennes, avionneurs et équipementiers.
Après une première phase d’adaptation aux mesures de sécurité sanitaire, les donneurs d’ordre et leurs sous-traitants doivent faire face à une vague d’annulations et de reports de commandes.
Malgré le taux d’intégration locale de 38%, plusieurs acteurs majeurs de l’aéronautique au Maroc subissent directement ou indirectement les décisions de fermeture d’usines à l’étranger.
Boeing a déjà pris les devants en prolongeant la fermeture de ses principaux sites de production. Airbus a annoncé réduire sa cadence de production de 30 à 40%.
Les perturbations attribuables à la pandémie de Covid-19 pourraient réduire le taux d’occupation de la capacité installée au Maroc de 30% voire 50% pour certaines activités tel que le MRO et l’ingénierie.
Compte tenu du manque de visibilité des grands donneurs d’ordre mondiaux sur l’avenir et le cycle long de l’aéronautique, le fort niveau d’activités enregistré ces dernières années ne sera retrouvé qu’en 2023.
Cette baisse d’activité impacte automatiquement sur les ressources humaines qui doivent en conséquence être ajustées en fonction de la charge de travail. Pour rappel le Capital Humain hautement qualifié de l’Industrie Aéronautique constitue le noyau dur, moteur de la croissance économique de ce secteur « Grâce à nos compétences humaines, nous avons pu garantir sur plusieurs années, une croissance de 22% », déclare Karim Cheikh, président du GIMAS.
L’industrie aéronautique au Maroc
L‘Industrie Aéronautique Marocaine fait partie de l’histoire de l’industrie marocaine. La création de Royal Air Maroc en 1957, a favorisé le développement de capacités MRO (Maintenance Repair Overhall) pour sa propre flotte. En 1999, Royal Air Maroc et Safran ont créé une joint-venture pour la maintenance et la réparation des moteurs, qui a confirmé la capacité du Maroc à développer le savoir-faire dans ce domaine, avec des techniciens qualifiés et certifiés. Cette première usine du Groupe Safran au Maroc n’était qu’un début de développement du Groupe au Royaume, avec 8 filiales employant aujourd’hui environ 4500 personnes.
Depuis lors, de plus en plus d’entreprises ont commencé à s’implanter au Maroc. De 2000 à 2019, plus de 142 entreprises opérant dans l’industrie aérospatiale se sont implantées au Maroc, employant 17 500 salariés qualifiés (dont 40.6% de femmes) et représentant 1.9 Milliards de $ à l’Export avec plus de 38% de taux d’intégration.
Vingt années marquées par une aventure humaine et technologique, qui positionne le Maroc parmi les destinations les plus compétitives et les plus attractives de la carte mondiale de la construction aéronautique et confirme l’ambition du royaume dans ce secteur à forte valeur ajoutée.
Annoncé en Novembre 2016, le partenariat stratégique avec le Ministère de l’Industrie, renforcé par la signature d’un plan d’accélération industrielle, a permis à cette industrie de s’engager dans sa nouvelle phase de développement avec des objectifs ambitieux à l’horizon 2020 : tripler le nombre d’employés pour atteindre 30 000, doubler le nombre d’entreprises 200, et réaliser 42% d’intégration locale.
La capacité de résilience des acteurs de l’aéronautique au Maroc
Ayant pour souci l’intégration à l’écosystème national et souhaitant participer à l’enrichissement de ce dernier et son développement, le GIMAS a toujours travaillé étroitement avec les pouvoirs publics pour l’intérêt national. Ce mode opératoire a permis le lancement de plusieurs initiatives structurantes telles que la création de l’Institut Marocain des Métiers de l’Aéronautique en 2011 qui formé plus de 8000 techniciens. Le cluster Recherche et Innovation du groupement soutient aussi l’entrepreneuriat marocain à travers le CES Morocco qui a permis la participation et le soutien d’une dizaine de start-ups chaque année au CES Vegas, en partenariat avec l’ambassade des États-Unis au Maroc.
L’apparition de la pandémie du COVID-19 a été une autre preuve de la réactivité de ce secteur et sa contribution à l’effort national pour combattre ce virus. Le GIMAS a ainsi mobilisé ses membres pour la participation au développement et la création des respirateurs pour les patients du COVID-19. En partenariat avec le Ministère de l’Industrie, du Commerce, de l’Économie Verte et Numérique et la collaboration de nombreux partenaires technologiques et le corps médical, le premier respirateur 100% Marocain s’est fait en un temps record. La livraison de 500 respirateurs est prévue en ce mois d’avril.
« Parce que nous croyons en la capacité de résilience du Maroc et des Marocains, nous avons opté pour une démarche proactive, ouverte et innovante. Nous appelons à cette réflexion pour du moyen et du long terme et nous aimerions y associer d’autres secteurs industriels. L’objectif est d’aborder ensemble les conséquences de la pandémie du COVID-19 et les mutations qui seront nécessaires. Une redistribution des cartes sera opérée dans le monde, Cette dynamique va nous permettre – tous ensemble – de reprendre rapidement et de nous adapter à la nouvelle situation et de nous en sortir gagnant », déclare Karim Cheikh, Président du GIMAS.
« Nos objectifs sont clairs : sociale en préservant le maximum d’emplois, économique à travers la survie et le développement de nos membres, et partage du savoir-faire et de la technologie. Nous comptons sur le soutien de l’état pour atteindre ces objectifs.
Notre contribution à la fabrication du premier respirateur marocain n’est qu’un exemple de transfert de savoir-faire, de l’agilité dont nous sommes capables et de la capacité d’adaptation des entreprises de l’Aéronautique et spatial ».
Une autre exemplarité des entreprises de l’aéronautique au Maroc et leurs collaborateurs durant cette crise, est le très faible taux d’absentéisme (moins de 5%) comparé aux plateformes aéronautiques des autres pays où ce taux est supérieur à 30%.
Ceci montre à la supply chain mondiale, la solidité de la base Maroc dans la gestion de cette crise par l’Etat qui a maîtrisé la situation très tôt pour assurer la protection sanitaire de sa population.
La reprise des activités de l’industrie aéronautique dépendra de la durée de propagation de la pandémie et du lancement des programmes des donneurs d’ordre en l’occurrence Airbus et Boeing.
En attendant, il y a lieu de recenser les opportunités qu’offrent cette crise au niveau de la préparation du tissu industriel aeronautique. Cette industrie se divise en tout ce qui concerne l’ingénierie ou le hardware et le software et l’assemblage qui restera dominant. Le Maroc se doit se positionner pour investir dans les deux créneaux ; condition préalable pour asseoir une stratégie de formation des collaborateurs avec pour objectif »bon du premier coup ».