Le niveau bas des taux d’intérêt constitue l’un des défis importants auxquels fait face l’industrie de l’assurance, a affirmé mercredi le Wali de Bank Al-Maghrib (BAM), Abdellatif Jouahri.
« Dans le contexte national, les taux bas conjugués à l’étroitesse du marché boursier constituent un véritable défi pour le développement de l’épargne et de certains segments de l’assurance », a souligné M. Jouahri lors de la 7ème édition du Rendez-vous de Casablanca de l’Assurance, placée sous le Haut Patronage de SM le Roi Mohammed VI.
« On l’oublie ou on l’ignore souvent, mais une baisse des taux n’a pas que des conséquences positives. Elle permet certes de relancer la demande et l’investissement, mais a également un impact néfaste sur l’épargne, en particulier la petite », a relevé M. Jouahri.
Cette baisse pourrait peser sur l’équilibre des fonds de retraite et sur la rentabilité des entreprises d’assurance, souligne-t-il, notant que l’environnement des « taux bas et pour longtemps » est une nouvelle réalité que les acteurs du secteur sont appelés à prendre en compte dans leurs stratégies et leurs décisions.
En effet, la stagnation séculaire de l’économie mondiale et le mouvement désinflationniste induits par des facteurs structurels tels que la technologie et la démographie « maintiendraient vraisemblablement la pression sur les taux dans les années à venir », a-t-il estimé.
Le deuxième défi est celui du changement climatique, a-t-il fait savoir, notant qu’une prise de conscience de plus en plus généralisée de cet enjeu amène les décideurs publics et privés à en tenir compte dans leurs décisions.
« Dans le secteur financier en particulier, le verdissement est une tendance qui prend de l’ampleur avec une orientation vers son intégration progressive parmi les normes et les standards de régulation et de supervision », a fait remarquer le Wali de BAM, appelant les acteurs de l’assurance à s’adapter et à s’approprier cette tendance au lieu de « la subir dans les années à venir ».
L’autre mutation qui ne cesse de surprendre par sa rapidité ainsi que par l’étendue et la profondeur de ses implications, est la transformation digitale, a-t-il enchaîné, notant qu’elle représente une révolution accélérée par la crise.
« L’assurance bien sûr n’est pas à la marge de cette révolution. Elle est appelée à l’appréhender pour adapter son organisation, améliorer ses produits et ses modes de commercialisation », a-t-il décliné.
Malheureusement, déplore M. Jouahri, « cette transformation n’a pas que des implications positives, mais elle est aussi à l’origine des risques liés au cybercriminalité qui menace les organismes et qui pose également un défi majeur en matière de protection des données à caractère personnel ».
« L’industrie nationale de l’assurance œuvre certes pour se maintenir en phase avec ces mutations et ces changements de paradigmes, mais la rapidité avec laquelle ils évoluent requiert une montée en échelle de l’investissement aussi bien en technologies qu’en capital humain », fait observer M. Jouahri.
Par ailleurs, M. Jouahri a rappelé que le développement de l’assurance inclusive figure parmi les objectifs prioritaires de la Stratégie Nationale d’Inclusion Financière (SNIF) que le ministère des Finances et BAM ont élaborée ensemble avec les parties prenantes et lancée en 2019.
La feuille de route de cette stratégie prévoit pour ce volet trois axes dont le premier consiste à concevoir des offres innovantes adaptées notamment aux populations à bas revenus, aux micro-entreprises et aux TPME, alors que les deux autres consistent à renforcer l’offre d’assurance dans le secteur agricole ainsi que l’éducation financière et la communication.
Pour sa part, Othman Khalil EL Alamy, Secrétaire Général de l’Autorité de Contrôle des Assurances et de la Prévoyance Sociale (ACAPS), a souligné que l’autorité a inscrit la promotion de l’assurance inclusive comme chantier prioritaire, lequel est est mené grâce aux concours des différentes parties prenantes engagés dans la SNIF, visant à faire évoluer le cadre réglementaire pour qu’il puisse soutenir le développement de cette assurance.
A cet égard, le responsable a fait état de l’introduction en cours des amendements réglementaires qui favorisent la simplification des contrats de micro-assurance à travers la limitation des exclusions, un délai d’indemnisation réduit et une simplification des procédures de gestion et de déclaration en cas de sinistre.
La réussite de ce chantier est tributaire de la mise en place d’actions d’éducation financière adaptées et ciblées, a-t-il insisté, qualifiant cette condition de « primordiale » tant qu’ »elle contribue à lever les obstacles culturelles et cognitives » qui peuvent subsister au niveau des populations ciblées.
« Nous travaillons en collaboration avec la Fondation Marocaine pour l’Éducation Financière et la Fédération Marocaine des Sociétés d’Assurances et de Réassurance (FMSAR) sur le développement du programme d’éducation financière ainsi qu’à l’élaboration des plans d’action spécifiques aux populations concernées », a-t-il dit.
Il a dans ce sens annoncé le lancement prévu d’une enquête de pénétration annuelle de la micro-assurance au Maroc, qui permettra d’établir un baromètre pour disposer d’un état des lieux précis et de suivre l’impact réel auprès des populations cibles des diverses mesures et initiatives entreprises en vue de leur éventuel ajustement.
Cette rencontre, organisée par la FMSAR sous le thème « Inclusion en assurance et résilience aux pandémies », met à l’honneur le Cameroun. Au programme de cette 7ème édition, figurent des tables rondes autour de l’usage des technologies innovantes et des moyens à mettre en place pour rendre l’assurance plus inclusive et couvrir des populations qui, jusque-là, étaient en marge des systèmes assurantiels classiques.