ENVIRONNEMENT – Face à l’urgence du changement climatique, accélérer l’adoption de meilleures pratiques en matière d’efficacité énergétique est désormais un impératif pour la communauté internationale. Tel est le leitmotiv des dirigeants et opérateurs publics et privés réunis cette semaine à Washington lors du Forum mondial sur l’efficacité énergétique au cours duquel l’expérience du Maroc a été mise en valeur.
« Nous sommes un pays qui est cité comme exemple. Cette année, ce sont le Maroc et le Mexique qui étaient à l’honneur », a déclaré jeudi à la MAP le directeur général de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE), Said Mouline.
Le prestigieux Prix du Visionnaire en efficacité énergétique (Energy Efficency Visionary Award) attribué en 2017 à Sa Majesté le Roi Mohammed VI par ce même Forum consacre la pertinence et la proactivité du Royaume à travers la stratégie mise en place dans plusieurs secteurs comme l’industrie, les transports, l’agriculture et le bâtiment.
Garantir l’efficacité énergétique
A Washington, les spécialistes du domaine ont focalisé les discussions sur les moyens de garantir l’efficacité énergétique pour les catégories sociales les plus basses et la manière dont les financements et les subventions peuvent toucher ceux qui n’ont pas les moyens pour investir dans des appareils et des lampes qui consomment moins pour pouvoir réduire la facture énergétique. Dans ce sens, les cas du Maroc et du Mexique ont montré, selon lui, l’importance de mobiliser des financements qui ont permis aux banques locales de financer l’efficacité énergétique.
De l’avis du directeur général de l’AMEE, l’efficacité énergétique est « un peu le parent pauvre de la transition énergétique, au niveau mondial ». Les énergies renouvelables s’accaparent le gros des investissements, et l’efficacité énergétique nécessite beaucoup plus d’investissements, sachant qu’elle est très rentable, a-t-il indiqué, expliquant que chaque dollar investi dans l’efficacité énergétique rapporte quatre dollars au pays « parce qu’on réduit la facture énergétique, on réduit les émissions de GES, on influe sur la balance des paiements des pays, et sur la facture énergétique des citoyens, qui, au lieu de gaspiller de l’énergie, et payer plus, cet argent est réajusté dans l’économie avec un autre impact important ».
Un programme comme le MORSEF, Moroccan Sustainable Energy Financial Facility, a permis de mobiliser plus de 1 milliard de dirhams d’investissements pour les industriels, avec 10% de subventions, a indiqué M. Mouline en insistant sur l’importance de généraliser cette approche à tous les acteurs. L’expérience du Maroc dans le domaine de l’agriculture a été en outre évoquée, citant les outils financiers en place pour aider les agriculteurs à investir dans des pompes solaires au lieu des pompes diesel.
« Il faudrait généraliser ce modèle au reste des citoyens, aux villes, dans les secteurs du transport, parce que c’est important d’accompagner l’investissement dans ce domaine », a-t-il poursuivi car « tout le monde est gagnant avec l’efficacité énergétique, parce que le pays baisse sa facture énergétique, l’industriel réduit sa facture énergétique et devient plus compétitif, la ville peut baisser sa facture énergétique avec son éclairage public et autre, ainsi que le citoyen qui a besoin d’être aidé pour faire ces investissements ». Outre le financement, le forum a aussi braqué les projecteurs sur l’aspect réglementaire.
Au Maroc, « on a mis en place des normes, des standards, pour les appareils électroménagers, la climatisation, les voitures pour que nous ayons un citoyen averti lorsqu’il va acheter un produit, qu’il sache ce qu’il va lui coûter en terme de facture d’énergie », a souligné M. Mouline, relevant l’importance d’accompagner les citoyens qui ont des appareils électroménagers très anciens (Réfrigérateurs, climatiseurs..) qui consomment énormément d’énergie mais n’arrivent pas à investir dans de nouveaux, à travers des modes de financements, à l’instar de la prime à la casse pour les taxis. « Mais il faut aussi mettre en place des standards et des normes pour les importations. On ne peut pas importer ce qui, parfois, ne coûte pas très cher mais qui consomme beaucoup », a-t-il dit en notant qu’au vu des effets du réchauffement climatique et des pics de chaleurs, les appareils de climatisation sont partout présents, de plus en plus bon marché mais pas très efficace, ce qui alourdit la facture d’électricité.
Au Maroc, le texte portant sur les standards relatifs à ce domaine, est aujourd’hui au niveau du secrétariat général du gouvernement, et suit sa voie pour qu’ils puisse entrer en vigueur, a précisé M. Mouline, insistant que l’efficacité énergétique passe par les volets de la réglementation, de l’accompagnement technique et financier ainsi que la sensibilisation. Dans ce sens, il a cité le centre de formation sur l’efficacité énergétique de Marrakech, aussi bien pour le Maroc que pour l’Afrique au vu du nombre important de délégations de plusieurs pays du continent qui viennent en formation dans ce domaine.
Dans ce sens, le Forum de Washington a mis l’accent sur l’importance du continent africain avec ses 600 millions d’habitants sans électricité aujourd’hui, ce qui pose l’impératif de veiller à les doter d’électricité selon un modèle complet qui intègre les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Ainsi, l’industrie marocaine présente aujourd’hui, selon M. Mouline, un savoir-faire et des produits développés – du panneau solaire jusqu’aux batteries, qui sont fiables et qui s’exportent au niveau international.