Abed-Chagar

Le Maroc s’en sort très bien sur le plan industriel. C’est du moins ce qu’affirme Abed Chagar, le président de la Fédération de chimie et parachimie (FCP). Une conclusion qu’il tire de son analyse des dernières performances réalisées par le secteur et des perspectives qui, pour lui, sont “très optimistes“.

Comment évaluez-vous la performance globale de l’industrie marocaine en 2023 ?

De mon point de vue, en tant que président de la Fédération de Chimie et Parachimie, et directeur général d’une industrie leader dans la peinture, le Maroc, malgré les crises qui s’enchaînent, s’en sort très bien sur le plan industriel. En effet, notre production industrielle évolue de manière très importante d’une année à l’autre. On le sait aujourd’hui, contrairement au passé, l’export du Maroc est composé à plus de 80% de produits manufacturés localement, avec des performances spectaculaires pour des secteurs comme l’automobile qui devrait dépasser, en principe, les 13 milliards de dollars cette année. L’aéronautique qui peut-être, n’a pas connu une grande influence, est autour de 2 milliards de dollars. L’agroalimentaire, malgré la sécheresse rude garde une part importante dans la production, notamment pour satisfaire le besoin national et exporter autour de 6 milliards de dollars.

Quid de votre filière, la Chimie-parachimie en particulier ?

Aujourd’hui, la chimie dans toutes ses filières est une activité très importante. On parle d’une industrie qui avoisine 200 milliards de dirhams. Elle rassemble plusieurs filières telles que la détergence, la peinture, le verre, le phytosanitaire, la cosmétique, le gaz, les commodités, les résines, la soude, et j’en passe. Plusieurs industries donc, avec de grands opérateurs, d’abord nationaux comme l’OCP, leader mondial dans son domaine, la SNEP, la SCE, Colorado et d’autres. Mais aussi plusieurs multinationales qui sont présentes et font partie de la Fédération de Chimie et Parachimie. Tous ces acteurs nous permettent de pouvoir satisfaire largement le besoin national en produits chimiques, mais aussi d’exporter. Le plus grand exportateur reste l’OCP, qui fait une très bonne année, même si les chiffres sont en baisse par rapport à 2022, en raison du retour à la normale des prix.

Avez-vous observé des tendances émergentes ou des changements significatifs dans votre domaine d’activité spécifique ?

Les tendances, c’est qu’aujourd’hui tous les produits de la détergence se vendent très bien au Maroc et l’évolution continue. Je pense que ça reste une très bonne chose. La partie des engrais représentée par l’OCP et d’autres distributeurs est en plein développement. La cosmétique, elle aussi se développe très bien avec la reprise de l’activité touristique dont elle est largement dépendante. Quelques secteurs par contre ne se sont pas beaucoup développés. C’est le cas de la peinture où l’activité a un peu stagné. Pourquoi ? Parce que l’immobilier connaît une légère récession depuis quelques années.

Quelles sont alors les perspectives de la filière pour 2024 ?

Dans notre secteur, nous sommes très optimistes pour plusieurs raisons. D’abord, en commençant par la peinture et le bâtiment, c’est un secteur qui devrait bien décoller en 2024. Il y a plusieurs mesures prises par les pouvoirs publics qui vont permettre à ce secteur de revenir à une embellie comme dans les années 2000. Premièrement, la mesure prise par le gouvernement d’octroyer une aide directe au logement économique, 100.000 dirhams pour le logement en deçà de 300.000 dirhams et 70.000 dirhams pour le logement entre 300.000 et 700.000 dirhams. Le budget réservé par l’État dans la loi de finance 2024 parle de plusieurs milliards de dirhams, donc cela devrait engendrer naturellement des dizaines de milliers de ventes de logements, booster directement l’activité du bâtiment et indirectement celle de la peinture et d’autres secteurs.

Ensuite, chaque année dans la chimie, il y a de gros investissements, des lancements de PME, etc. Mais ce qu’il faut noter, c’est que prochainement, peut-être à moyen terme, il y aura de grandes activités chimiques autour des batteries à haute performance.  Autant de choses qui viendront développer l’activité chimique au Maroc, non seulement pour la production locale mais surtout pour l’export.  Cela va permettre aussi d’attirer, grâce à l’écosystème qu’on mettra en place, d’autres investissements et d’autres activités. Nous sommes donc très optimistes.

Cette perspective s’applique-t-elle à votre filière où s’étend-elle, selon vous, à l’ensemble du secteur industriel marocain ?

Nous pensons que 2024 va être très productive pour l’industrie nationale, pas seulement pour la chimie. Surtout qu’on a des échéances très importantes, notamment la coupe d’Afrique 2025 et la coupe du monde 2030. On peut alors s’attendre à des opérations de démolition et de reconstruction des stades, des routes refaites, et le renforcement de la capacité litière qui implique de nouveaux hôtels. Ajoutés à cela, les grands projets infrastructurels comme le prolongement de la ligne TGV, les ports à construire, etc. Ce sont autant de projets qui impliquent le secteur industriel au premier plan.

Et il n’y a pas que cela, puisqu’il y a eu d’autres mesures, notamment celle concernant les personnes qui étaient interdites de chéquiers pour de grosses pénalités. Aujourd’hui le gouvernement a adopté une indemnité dérisoire pour récupérer le chéquier. Cela va contribuer à relancer l’activité économique de manière générale. N’oublions pas que le gouvernement a instauré depuis 2023, une baisse de l’IS de 26 à 20%, selon un schéma dégressif de 1,5% chaque année, et pendant 4 ans. Ça aussi, c’est une mesure qui va encourager l’investissement, d’autant plus que 2023 a connu la promulgation de la charte d’investissement. Une charte faisant la part belle aux incitations, opérationnelle aujourd’hui.

Il y a aussi des autoroutes de l’eau qui vont être lancées, sans oublier le programme de reconstruction de 120 milliards de dirhams de la localité d’Al Haouz. Tout ça pour dire que malgré les incertitudes, il y a des projets qui laissent entrevoir un horizon très positif et très prometteur pour 2024.

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