Article d’opinion – Par Li Yong, Directeur général de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI), le 20 septembre 2019.
Lorsque les dirigeants mondiaux se sont réunis à New York pour la 70e session de l’Assemblée générale en 2016 et ont proclamé la période 2016-2025 troisième Décennie du développement industriel de l’Afrique (IDDA III), ils ont réaffirmé l’importance de l’industrialisation dans le cadre des efforts fournis par l’Afrique en vue d’une croissance économique soutenue, inclusive et durable et d’un développement accéléré.
De grands changements se sont produits dans cette région depuis le lancement de cette Décennie et l’appel lancé à l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) pour élaborer et mener la mise en oeuvre de l’IDDA III avec nos partenaires, la Commission de l’Union africaine, le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique et la Commission économique pour l’Afrique.
Le PIB collectif du continent devrait s’élever à 2,6 billions de dollars et les dépenses de consommation à 1,4 billions de dollars en 2020. Il est également estimé que 50 % des Africains habiteront en ville d’ici 2030. Ces chiffres reflètent des perspectives impressionnantes dans le continent où la moyenne d’âge est la plus faible.
La transformation numérique se développe également – la Banque mondiale a estimé que la transformation numérique permettra de faire augmenter la croissance en Afrique de près de 2 points de pourcentage par an et réduira la pauvreté de près de 1 point de pourcentage en Afrique subsaharienne.
L’impact des technologies numériques sur le développement socio-économique est en train d’être exploité et a conduit à la création de nombreuses start-ups et centres technologiques en Afrique.
La Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), la plus grande zone de libre-échange quant au nombre de pays participants, devrait entraîner une augmentation des exportations, une plus grande valeur ajoutée dans l’industrie manufacturière et les services, et la création d’opportunités commerciales intra-africaines plus diversifiées avec des avantages pour les petites et moyennes entreprises en Afrique.
Bien que les taux de croissance en Afrique n’aient toujours pas atteint les 7 % nécessaires pour sortir la population de la pauvreté, l’optimisme vis-à-vis du continent africain prévaut. L’extrême pauvreté en Afrique a commencé à diminuer, et, si cette tendance se poursuit, le nombre d’Africains vivant dans l’extrême pauvreté devrait diminuer de 45 millions de personnes d’ici 2030.
Le rapide déploiement de technologies de pointe dans le cadre de la quatrième révolution industrielle offre un appui supplémentaire à la transformation du secteur manufacturier en Afrique.
L’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel estime qu’il est essentiel que l’Afrique soit prête à relever les défis de la numérisation et à saisir les opportunités offertes par la quatrième révolution industrielle dans la poursuite d’un développement industriel inclusif et durable (ISID, selon l’acronyme en anglais) afin de remplir les objectifs de l’agenda 2030 pour le développement durable et les objectifs de développement durable.
Le Rapport sur le développement industriel 2020 de l’ONUDI, une publication phare sur la quatrième révolution industrielle qui sera présentée en novembre de cette année, montrera que les technologies numériques de production avancées appliquées à la production manufacturière offrent un énorme potentiel pour promouvoir la croissance économique et le bien-être humain tout en protégeant l’environnement.
Cette étude s’appuie sur les connaissances existantes concernant les priorités de la numérisation pour l’Afrique et met en lumière une approche à deux volets afin que l’industrie manufacturière reste une voie de développement valable. L’une de ces approches concerne la nécessité pour l’Afrique de se préparer à un avenir plus numérique, tout en renforçant les capacités industrielles, à travers un meilleur accès à internet à haut débit et en développant des compétences techniques et des pôles de technologie. Il faudra s’attaquer à des obstacles tels que la limitation de l’infrastructure de base, l’accès à une énergie propre, fiable et abordable, et les capacités et compétences humaines.
Les systèmes autonomes dans l’industrie manufacturière sont susceptibles d’entraîner une demande accrue de capital humain qualifié en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM). Cette demande croissante polarise la main-d’oeuvre en augmentant la proportion d’emplois à salaire élevé et en diminuant la proportion d’emplois à salaire moyen ou faible. Elle peut priver l’Afrique de possibilités d’emploi là où se concentrent les emplois faiblement rémunérés et où le capital humain doté de fortes compétences numériques est en pénurie.
En raison du manque d’accès aux nouvelles technologies, à l’information et à l’infrastructure, les écarts de technologie et de compétences entre l’Afrique et les pays développés risquent de se creuser sous l’influence de la quatrième révolution industrielle, ce qui pourrait avoir un impact sur les petites et moyennes entreprises locales qui auront aussi besoin d’un soutien plus important en matière de formation technologique et d’innovation des entreprises pour être compétitives dans le marché mondial.
L’ONUDI s’efforcera d’aider ses États Membres d’Afrique à devenir des « économies plus diversifiées et fondées sur le savoir » grâce à la coopération en matière de transfert de technologie, d’innovation et de développement des infrastructures.
Nous tirerons davantage parti de notre Programme de partenariat pays (PCP, selon l’acronyme en anglais) pour mobiliser des ressources en faveur d’un développement industriel inclusif et durable. Il s’agit notamment d’appuyer la mise en place de l’infrastructure des technologies de l’information et des communications, qui est essentielle pour répondre aux besoins de numérisation de la quatrième révolution industrielle.
Tout en soutenant le développement de la base industrielle de l’Afrique, en collaboration avec nos partenaires du système des Nations Unies pour le développement, tels que la FAO, l’OIT, le CCI, la CNUCED et le PNUE, nous continuerons à soutenir la création d’emplois « verts » et décents à travers des initiatives telles que le Programme pour les emplois « verts ».
Grâce à nos connaissances et notre expérience en matière de développement industriel, nous pouvons étudier de manière plus approfondie l’application de la technologie numérique et des miniréseaux afin de soutenir un accès à l’électricité propre, fiable et abordable en Afrique, qui répondra à la demande en électricité des ménages et pourra également être utilisée dans le domaine de la production.
Nous mettrons également à profit notre expérience en matière de plateformes numériques d’apprentissage pour soutenir le développement du capital humain. L’ONUDI et le Gouvernement finlandais ont mis à l’essai des programmes pilotes de formation à la réalité virtuelle en Afrique australe qui sont actuellement reconduits au Malawi, en Zambie et au Zimbabwe. En utilisant des plates-formes d’enseignement 3D mobiles, la réalité virtuelle aide les étudiants en foresterie à apprendre à utiliser les tronçonneuses en toute sécurité.
Au Libéria, l’ONUDI, avec l’appui du Gouvernement japonais et en partenariat avec la société japonaise Komatsu, a déployé des technologies et des innovations numériques dans ses installations de production, ce qui a permis de mettre en place des programmes de formation axés sur le marché du travail dans les domaines de l’exploitation des excavatrices et dans le secteur des services, notamment à l’intention des jeunes et les femmes.
Alors que les dirigeants du monde se réunissent de nouveau à New York pour le débat général de la 74e session de l’Assemblée générale des Nations Unies, en marge du sommet historique sur les objectifs du développement durable, pour faire le point sur la situation actuelle et sur ce qui doit être accompli afin de remplir les objectifs de l’agenda 2030 pour le développement durable, l’ONUDI et ses principaux partenaires issus du domaine du développement, la Commission de l’Union africaine, la Commission économique pour l’Afrique, la Banque africaine de développement, l’Initiative AfroChampions, l’African Export – Import Bank et l’Union internationale des télécommunications vont renforcer leur partenariat pour appuyer le développement des infrastructures et de l’innovation en Afrique.