« les PME doivent croire aux marchés financiers »

A l’occasion du lancement à Casablanca du programme ELITE, Industrie du Maroc a demandé à Karim Hajji, directeur général de la Bourse des valeurs de Casablanca (BVC) de dresser les enjeux de la place financière marocaine.

IDM : vous venez de lancer le programme elite destiné à l’accompagnement du développement des PME. de quoi s’agit-il exactement ?

Karim Hajj : Elite est un programme d’accompagnement dédié aux entreprises ambitieuses qui souhaitent préparer la prochaine étape de leur croissance. Ce programme prépare les entreprises à être en phase avec les exigences du marché financier en travaillant concrètement sur leurs problématiques. Il est construit sur une approche innovante qui comprend un programme de formation, une période d’accompagnement soutenue par des mentors et un accès direct à la communauté financière par le biais d’une plateforme communautaire dédiée. En europe, elite rencontre beaucoup de succès depuis son lancement en 2012 par borsa italiana, filiale du london stock exchange group. Il regroupe actuellement plus de 320 entreprises de 21 pays européens, 150 conseillers financiers et partenaires professionnels et 90 investisseurs institutionnels auxquels s’ajoute la communauté elite marocaine. Au Maroc, la bourse de Casablanca a personnalisé le programme elite afin qu’il apporte la réponse aux nombreuses problématiques spécifiques aux entreprises marocaines. Aussi, les entreprises marocaines certifiées « elite » seront aux mêmes standards que toute entreprise européenne et feront partie d’une communauté elite internationale d’entreprises, d’experts et d’investisseurs. Ceci représente une opportunité de business et une visibilité sans pareille qui facilitera sans nul doute leur accès au financement.

Douze entreprises font partie de la première cohorte d’elite, sur quels critères sont-elles sélectionnées ?

elite est destiné aux entreprises, y compris les pme ambitieuses qui souhaitent se développer et accéder au financement de leur croissance. Ces entreprises doivent présenter une équipe managériale crédible et être motivées pour faire face au changement culturel et organisationnel requis pour accéder aux opportunités de financement à long terme. Les entreprises sélectionnées peuvent appartenir à tous les secteurs d’activité, et être de différentes tailles. Cette première cohorte réunie d’ailleurs des entreprises bénéficiant de tous ces critères et opèrent dans des secteurs d’activité différents.

Comment se porte la bourse de casablanca ? et quels sont vos projets pour les prochaines années qui viennent ?

Cette année, nous poursuivrons la mise en œuvre de notre stratégie de développement, qui est déployée en deux phases. D’abord, nous travaillons à consolider notre offre de produits et de services technologiques afin de mieux positionner la bourse en tant que moyen de financement de l’économie. Pour ce faire, nous avons acquis une nouvelle plateforme de cotation auprès de millenium it filiale de lseg et qui est aux meilleurs standards internationaux. Cette plateforme sera opérationnelle au cours de l’année. Dans ce même sens et après le lancement de la 1ère cohorte d’elite, nos équipes travaillent déjà sur la constitution de la 2ème cohorte de l’année prévue pour novembre prochain. En parallèle nous travaillons à préparer le lancement d’un marché alternatif afin d’être opérationnel dès adoption de la loi sur la réforme de la bourse. Cette dernière permettra d’insuffler un nouvel élan au marché des capitaux par la mise en place de nouveaux produits et instruments financiers. Ainsi, grâce à une offre diversifiée de produits, une offre technologique sécurisée et aux meilleurs standards internationaux, la bourse de Casablanca sera à même de devenir une alternative attractive et compétitive de financement et d’investissement, sur le plan régional et international. Et c’est justement la seconde phase de notre stratégie : devenir un acteur régional dans le financement de l’économie.

Le rythme des IPO a été très faible ces dernières années. Pourquoi ?

En effet, d’ailleurs, nous avons constaté lors de nos réunions de prospection, ainsi qu’à travers l’étude que nous avons commanditée conjointement à l’association professionnelle des sociétés de bourse (apsb) et maroc pme, que les entreprises sont réticentes à l’introduction en bourse, pour plusieurs raisons : méconnaissance du marché des capitaux, difficulté à répondre aux exigences du marché financier, peur de perdre le contrôle de leurs entreprises… et c’est d’ailleurs pour cela que nous avons pensé à déployer elite ! a terme, les entreprisses qui ont bénéficié du programme auront recours au marché financier et à la bourse pour financerleur développement ce qui contribuera à dynamiser le marché.

Comment se développe le marché obligataire au maroc ?

Le marché obligataire a connu une réelle évolution depuis 2003. En effet les montants émis entre 2008 et 2014 ont triplé par rapport aux montants émis entre 2003 et 2007 soit en moyenne 14 mds par an contre 4,25 mds par an pour la deuxième période. Entre 2003 et 2013, 51% des émissions des obligations sont réalisées par des banques et des entreprises publiques comme le montre le graphe ci- dessous. en 2013 un ralentissement des émissions obligataires a été constaté et ceci principalement en raison d’un marché plus averse au risque de crédit et à la remontée des taux. aujourd’hui la bourse de Casablanca compte 44 emprunts obligataires soit un encours coté de 9 mrd mad à fin mars 2016, une part cotée des émissions obligataires peu significative. le marché obligataire pourrait représenter une meilleure alternative de financement pour les entreprises. pour cela, certaines mesures sont nécessaires telles que le rating pour donner plus de visibilité sur les primes de risque, ou l’adoption d’une courbe des taux et son utilisation pour le pricing des obligations pour des valorisations plus proches de la réalité. (Voir graphique)

Qu’en est-il du mode de fonctionnement de la BVC ? Y aura-t-il des changements?

La démutualisation du capital de la bourse de Casablanca permet en effet d’ouvrir ce dernier à de nouveaux actionnaires – des banques, des sociétés d’assurance, la Caisse de dépôt et de gestion et Casablanca Finance City authority. L’objectif est d’instaurer une place boursière érigée en hub financier intégré au sein de son espace régional, facilitant l’accès au capital et répondant aux besoins des émetteurs et investisseurs africains. La démutualisation vise notamment à rationaliser l’actionnariat de la bourse et à impliquer les principaux intervenants du marché des capitaux dans la définition de sa stratégie de développement, tout en améliorant la structure de gouvernance, le processus de prise de décision et l’efficacité opérationnelle de l’institution. Cette ouverture est donc une étape cruciale dans la construction de la nouvelle architecture de marché qui regroupera, au sein d’un même groupe et pour plus d’efficience, les acteurs actuels et futurs, et notamment la future Chambre de Compensation et le gestionnaire du marché à terme.

Qu’en est-il des investisseurs étrangers à la bourse de casablanca ?

l’investissement étranger en actions cotées à la bourse de Casablanca est réalisé à hauteur de 90% sous forme de participations stratégiques. la participation des investisseurs étrangers est relativement stable et oscille autour des 30%. Cette participation est calculée par la part de la capitalisation boursière détenue par les étrangers et MRE et a atteint 31,47% de la capitalisation à fin 2014. Les européens demeurent les premiers investisseurs étrangers à la bourse de Casablanca avec près de 50% du total de l’investissement étranger. La part flottante des capitaux étrangers investis à la bourse de Casablanca s’établit à 13,70% de la capitalisation flottante. Cenive auest d’ailleurs supérieur à plusieurs marchés comparables. Afin de promouvoir l’investissement étranger à la bourse de Casablanca, nous avons organisé en collaboration avec notre partenaire stratégique le london stock exchange group ainsi que plusieurs sponsors marocains le 21 & 22 avril 2016 un road show à londres. Cette 1ère édition intitulée « morocco, Your Footprint in africa » s’est tenue sur 2 journées : la première dédiée à une conférence plénière à laquelle ont assisté plus de 200 personnes et la seconde journée réservée aux rencontres one to one. d’ailleurs plus de 70 réunions ont eu lieu entre les 13 émetteurs marocains présents au london stock exchange, et près d’une quarantaine d’investisseurs étrangers. Cet événement a été pour nous une occasion de placer le Maroc dans l’environnement économique et financier international afin de mettre en avant les opportunités d’investissement qu’il offre dans différents secteurs (services financiers, de l’énergie et des mines, des télécoms et nti et de la logistique). Cela nous a également permis de présenter l’environnement économique et financier marocain, ainsi que les secteurs économiques nationaux phares et les grands groupes marocains ayant une expansion en Afrique.

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