David-Toledano

« 2023 est une année de palier qui va nous permettre de repartir sur 2024 avec un peu plus d’espoir et d’optimisme », assure David Toledano, président de la Fédération des matériaux de construction (FMC), qui qualifie sa filière de pionnière en termes de souveraineté.

IDM : Comment évaluez-vous l’activité industrielle dans le secteur des matériaux de construction pour l’année 2003 ?

David Toledano : Nous avons réussi à avoir une année de palier, en rattrapant un petit peu les consommations de ciment le dernier mois de décembre, ce qui a nous permis d’avoir quasiment les mêmes chiffres que 2022. Donc, cela marque un palier et l’arrêt du recul de consommation de ciment. C’est un bon signe dans la mesure où le mois de décembre était un mois très actif. Nous avons eu un bond de consommation de 19 %, et nous terminons autour de 0,19%, pratiquement au même niveau par rapport à l’année dernière. Alors, cela nous donne un peu d’espoir. Concernant les autres métiers, c’est à peu près la même chose.

Le secteur qui a le moins bien évolué, c’est celui du bâtiment. Puisqu’il y a eu moins de 15% sur ce secteur, mais les autres secteurs, infrastructures, distribution, béton prêt à l’emploi, et autres produits en béton se sont bien comportés. Voilà ce qui nous fait dire que 2023 est une année de palier qui va nous permettre de repartir sur 2024 avec un peu plus d’espoir et d’optimisme.

Sur quoi fondez-vous cet optimisme pour 2024 ?

Il y a plusieurs programmes concernant la construction, les infrastructures et le développement du pays, avec plusieurs engagements dans divers secteurs, consécutivement d’abord à ce qui s’est passé à Al Haouz, qu’il faut reconstruire. Donc là, nous avons quand même une très grosse enveloppe de 120 milliards de dirhams sur 4 ou 5 ans pour pouvoir reconstruire. C’est quelque chose que nous allons accompagner. Il y a les infrastructures que le Maroc s’est engagé à réaliser, non seulement pour la CAN 2025 et par la suite, la coupe du monde. Mais, il y a plusieurs autres infrastructures de transport qui devraient se développer, que ce soit au niveau du chemin de fer, des autoroutes, des aéroports… Bref, beaucoup d’infrastructures qui nécessiteront l’utilisation importante des matériaux de construction. Surtout dans le bâtiment qui, jusque-là, était le parent pauvre. Et pour terminer, la décision de Sa Majesté, avec le gouvernement, de mettre en place le programme d’aide au logement, avec 100.000 dirhams au niveau des logements sociaux et 70.000 dirhams au niveau des moyen-standings, sans aucune contrainte de quantité pour les promoteurs qui peuvent construire et revendre à des primo-accédants. Voilà donc ce qui nous rend un peu plus optimistes. Nous avons un très bon espoir pour qu’il y ait une bonne relance du secteur du bâtiment et des travaux publics en général pour les prochaines années.

Pensez-vous que cette embellie espérée donnera lieu à une création d’emplois durables ?

Évidemment ! Les investissements reprendront, ils ont déjà repris à certains niveaux d’ailleurs, les capacités augmenteront et lorsque vous avez des unités de production qui s’installent, c’est l’accompagnement, des emplois durables et du développement.

En ce qui concerne le Made In Morocco, quelle place occupe la valorisation du produit marocain dans votre activité ?

Nous avons toute une politique d’exportation et d’encouragement des produits exportés sur lesquels nous travaillons avec le ministère de l’Industrie, notamment les appareils sanitaires. Vous avez des grandes sociétés qui sont en train d’achever des gros investissements d’expansion, que ce soit dans le sanitaire, dans le carreau. Il y a eu beaucoup d’investissements dans l’industrie du marbre. Donc là aussi, il y a une amélioration de la qualité de l’offre. En ce qui concerne les aciers, nous avons également une grosse capacité de production. Donc, nous avons des capacités à l’exportation sur au moins 4 ou 5 métiers de notre fédération, et nous sommes en train d’essayer de voir comment on peut les soutenir et les aider à se développer à l’exportation.

Concernant l’export, quelle analyse faites-vous des tensions sur les lignes maritimes, venant s’ajouter à la taxe carbone et autres incertitudes ?

C’est la grande inconnue et c’est la grande menace pour 2024. Nous essayons, pour l’instant, de contenir au mieux les approvisionnements. Le plus difficile, ce sont les ruptures de stocks. Aujourd’hui, certains industriels, notamment de l’industrie automobile, commencent déjà à arrêter leurs unités de production en Europe par manque ou par anticipation, parce que ce sont des gens qui travaillent en flux tendu et qui anticipent des retards d’approvisionnement dus à une situation internationale dangereuse et chaotique en ce moment. Mais nous espérons que les choses soient maîtrisées le plus vite possible et qu’on ne s’installe pas dans une situation durable, comme nous l’avons connu entre 2021 et 2022. A notre niveau, nous essayerons de faire pour le mieux pour que les approvisionnements continuent à se faire dans les meilleures conditions et au meilleur prix.  Mais les choses que nous ne maîtrisons pas, malheureusement, nous les subirons comme le monde entier. C’est le gros challenge.

Face à ces incertitudes, vous présentez-vous en victime résignée ou avez-vous une stratégie ?

Non, nous n’allons pas en victime résignée. C’est une situation mondiale dans laquelle nous ne sommes pas d’un côté les victimes et les autres les gagnants. C’est une situation de fait que nous espérons dépasser le plus vite possible, c’est tout. Lorsque les choses se font normalement, les prix et la concurrence se font normalement.  Nous, nous chercherons toujours les meilleurs approvisionnements et les meilleures routes. Le Maroc est bien placé, dans un carrefour des routes mondiales, pour essayer de s’approvisionner au mieux. Nous faisons confiance à nos gestionnaires et à nos responsables pour étudier et calculer au mieux. Mais vous savez très bien que dans ce genre de situation, il y a toujours des gens qui sont en position de force, qui vont peut-être bénéficier ou profiter de la situation.

Sa Majesté a demandé aux industriels d’inaugurer une nouvelle ère industrielle. Quel écho la filière des matériaux de construction fait-elle à cet appel ?

Le secteur des matériaux de construction est une des fiertés de notre pays. Nous sommes dans un secteur où nous avons cette souveraineté nationale qui est couverte à 99%. Mais, il y a un fonds de matière première qui est importé. Les billets d’acier et les billets d’aluminium sont importés. Nous importons également le verre sur lequel nous avons subi des prix très importants, parce qu’il y a une forte demande au niveau mondial. Mais en ce qui concerne les autres industries, il s’agit d’industries nationales, avec des investissements nationaux ou internationaux, qui font que le Maroc se suffit largement. Nous sommes aujourd’hui en sous-capacité d’utilisation de nos capacités de production. Que ce soit dans les carreaux, la céramique, l’acier, le ciment, etc. Nous avons largement des capacités pour pouvoir rester dans l’axe que Sa Majesté a défini et tracé. Je dirais même que nous servons de modèle, parce que c’est une des industries les plus autonomes et les plus développées en capitaux nationaux.

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