Après une difficile période de Covid-19, ENGIE poursuit son développement en Afrique, notamment au Maroc, en Égypte et en Afrique du Sud en se concentrant sur la production d’énergies renouvelables, le dessalement de l’eau de mer, les infrastructures énergétiques et l’hydrogène vert. À cet effet, Philippe Miquel, actuel CEO d’ENGIE North Africa a fait part des nouveaux défis et ambition du Groupe.

Dans ce contexte de crise ukrainienne et de crise du COVID-19, quel rôle les énergies renouvelables peuvent-elles jouer pour contribuer à la reprise économique ?
Au-delà de la crise ukrainienne et de la crise du COVID-19, l’enjeu climatique ne fait aujourd’hui plus débat. Tout le monde a pris conscience qu’il fallait être collectivement responsable et que ce n’était qu’ensemble que nous aurons la capacité de limiter le réchauffement climatique à +1.5°C en 2050 par rapport à l’ère préindustrielle. Aujourd’hui, nos clients, nos fournisseurs, ceux qui nous financent, ce qui nous assurent… tous, nous demandent de leur fournir des solutions ou des services compatibles avec cet enjeu climatique.

Il y a 5 ans, pour être compétitif, nos clients nous demandaient d’avoir un produit de qualité et un prix compétitif. Désormais, ils nous demandent également de contribuer aux engagements climatiques.

La transition énergétique, c’est-à-dire le passage à un mix énergétique moins carboné et à une plus grande sobriété en matière de consommation d’énergie, est donc nécessaire pour atteindre cet objectif de +1.5°C en 2050. Pour que cette transition énergétique ait lieu, il faut qu’elle soit accessible économiquement, sinon rien ne se fera. Dans ce contexte, les énergies renouvelables ont un rôle essentiel à jouer. En particulier, d’un point de vue économique, puisqu’aujourd’hui, en coût complet, le solaire et l’éolien sont les technologies les moins chères pour produire de l’électricité.

Les énergies renouvelables ne sont donc plus seulement une réponse à l’enjeu climatique, mais également un facteur de compétitivité économique pour toute l’économie marocaine. La question n’est plus de savoir s’il faut passer aux énergies renouvelables, mais à quelle vitesse est-on en capacité de le faire très rapidement, et ce, quel que soit leur niveau de consommation.

Le Maroc occupe une place de « leader vert » dans la région Afrique du Nord, comment le Royaume pourra-t-il jouer un rôle dans l’essor de l’hydrogène vert pour approvisionner l’UE ?
Ce qu’ont démontré la crise ukrainienne et la crise du COVID-19, c’est que l’hyper mondialisation avait certaines limites. On assiste aujourd’hui à une très forte évolution des marchés où l’intégration régionale joue un rôle beaucoup plus important. L’objectif n’est plus uniquement de produire à bas coût, mais également de produire au plus proche de ses propres marchés pour une plus grande sécurité d’approvisionnement. Dans ce contexte, le Maroc qui était déjà un fournisseur privilégié de l’Europe, a un rôle de premier plan à jouer comme contributeur des enjeux de décarbonation de l’Union européenne. Le Maroc a, en effet, fait le choix très tôt de développer massivement les énergies renouvelables dans son mix énergétique.

L’hydrogène vert, c’est-à-dire produit à partir d’énergie renouvelable, est en plein essor. C’était jusqu’à présent le « chaînon manquant » de la transition énergétique : le vecteur énergétique décarboné en capacité de pallier l’intermittence des énergies renouvelables. L’hydrogène vert est amené, à terme, à remplacer le gaz naturel, notamment lorsque le gaz naturel n’aura pas pu être substitué par du biogaz ou du méthane de synthèse.

Le Maroc s’est également doté, en janvier 2021 d’une feuille de route sur l’hydrogène vert. Elle vise à développer jusqu’à 150 TWh de production d’hydrogène, dont près des deux tiers pour l’export vers l’Europe. Cela nécessitera l’installation d’environ 80 000 MW d’énergies renouvelables en 2050. Il n’y a donc pas de temps à perdre si le Maroc veut effectivement conquérir cette place convoitée de fournisseur majeur de l’Europe en hydrogène vert. D’autant que la concurrence est rude: l’Égypte, l’Arabie Saoudite, et même le Pérou développent des projets de grande capacité pour approvisionner l’Europe à un coût compétitif par rapport à l’hydrogène bleu, produit à partir de gaz naturel.

Quelle est votre lecture du positionnement du Maroc sur le Power-to-X ?
L’hydrogène et le Power-to-X joueront un rôle central dans la transition énergétique au Maroc, tant pour le pays lui-même que pour les marchés du Maroc à l’export. Le Maroc doit utiliser son plan de relance de l’économie pour développer une industrie autour de l’hydrogène vert en accélérant la décarbonation de l’industrie et du secteur des transports. Le Maroc peut également profiter de sa position géographique stratégique pour se positionner comme un fournisseur d’hydrogène vert pour l’Union européenne à moyen terme. Le plan de relance de l’Union européenne, qui est un partenaire stratégique du Maroc, a fait du Power-to-X un sujet clé pour la décennie 2020-2030 avec un objectif de mettre en service 40 GW d’électrolyseurs d’ici 2030.

Dans le Power-to-X, le Maroc dispose de nombreux avantages, notamment un accès à des énergies renouvelables à un coût très compétitif grâce à de très bonnes conditions de vent et d’ensoleillement. Le Maroc est donc en capacité de produire de l’hydrogène vert à un prix très attractif pour son propre marché, mais également pour exporter vers l’Europe. De plus, la proximité avec le continent européen permet au pays de limiter les coûts de transport.

Mais le marché de l’hydrogène vert est un marché mondial où le Maroc, à l’export notamment, sera en compétition avec d’autres pays. C’est aujourd’hui que les alliances se créent et que les premiers projets voient le jour. Il faut donc rapidement mettre en œuvre la feuille de route du Royaume dans le domaine du Power-to-X et faire émerger les projets marocains.

ENGIE a vendu récemment ses activités de services à l’énergie en Afrique. Pourquoi cette vente quelques années seulement après leur achat ?
Cette vente s’inscrit dans le cadre de la transformation du Groupe, voulue par notre Conseil d’Administration, qui vise une simplification de nos métiers pour se donner les moyens de notre croissance et asseoir la croissance future, notamment dans les énergies renouvelables. Une diversification excessive n’est pas souhaitable. Cette simplification du Groupe nous permet de nous recentrer sur nos métiers clés, notamment dans les infrastructures bas-carbone et les énergies renouvelables, secteur dans lequel ENGIE souhaite être le leader incontesté.

Quel impact cela va-t-il avoir sur les développements d’ENGIE en Afrique?
ENGIE poursuit ses développements en Afrique notamment au Maroc, en Égypte et en Afrique du Sud en se concentrant sur la production d’énergies renouvelables, le dessalement de l’eau de mer, les infrastructures énergétiques et l’hydrogène vert. L’accès à l’énergie est un enjeu majeur du continent africain où près de 50% de la population n’est toujours pas connectée au réseau électrique. Mais l’accès à l’eau est également un enjeu clé. Les problèmes de stress hydrique que connait le continent, notamment le Maroc, en sont le témoin. Dans ces domaines, et si on y ajoute l’hydrogène vert, le rôle des énergies renouvelables sera primordial.

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