Alors que le Maroc s’active pour redynamiser son industrie, l’innovation semble trainer du pied. Or, face aux défis de la mondialisation, les entreprises se doivent d’être de plus en plus innovantes. Qui dit innovation, dit R&D. Et qui dit R&D, dit coûts et dit surtout risques. Un casse-tête qui dure depuis des décennies. Comment résoudre cette équation qui paraît insoluble ?

Le constat est plus qu’évident : l’économie marocaine souffre d’un manque d’innovation – ce qui pèse sur les exportations du pays, en deçà de leur potentiel de sophistication. or, une compétitivité durable passe nécessairement par l’innovation. L’innovation telle qu’elle est définie par le manuel d’oslo de l’organisation de coopération et de développement économique ; c’est-à-dire « la mise en œuvre d’un produit (bien ou service) ou d’un procédé nouveau ou sensiblement amélioré, d’une nouvelle méthode de com- mercialisation ou d’une méthode organisationnelle dans les pratiques de l’entreprise, l’organisation du lieu de travail ou les relations extérieures ». Dans un monde mondialisé, à l’économie globalisée où la concurrence est rude et où les possibilités de réussite dépendent plus que jamais de la recherche & développement, et par conséquent des talents, les entreprises marocaines souffrent d’un manque flagrant de compétitivité due en partie au faible niveau d’innovation. Plusieurs études ont démontré que si l’innovation est faible au Maroc, ce n’est pas parce que les personnes capables d’innover n’existent pas, mais plutôt parce que l’on ne permet pas à l’esprit d’entreprise d’éclore. Le maroc s’était fixé en 2009 un objectif de créer 1000 brevets marocains et 200 start-up innovantes à l’ho- rizon 2014, aujourd’hui, les résultats se font toujours attendre. Pourtant, cette démarche intitulée « initiative maroc innovation » avait pour objectif à moyen terme de positionner le maroc dans le club des pays producteurs de technologies, de permettre l’éclosion d’une économie à forte valeur ajoutée mais aussi de renforcer l’image du maroc au niveau international et donc son attractivité pour les investissements. À plus long terme, il s’agissait plutôt de préparer dès des relais de croissance qui deviendront vitaux pour l’économie nationale. L’idée était de permettre à l’innovation d’être un levier économique important, en incitant des entreprises – essentiellement des PME et des TPE – à innover, tout en assurant une partie du financement de la recherche et de l’innovation. Or, aujourd’hui les entreprises, surtout les industriels, sont rares à miser sur la R&D. Seulement quelques grandes structures s’offrent le luxe d’investir ce domaine parfois couteux, mais aussi et surtout risqué. Car il est impossible de prédire quand la recherche va-t-elle donner ses fruits et encore moins combien nécessitera-t-elle. « Les entreprises, comme nous l’explique Abdelaziz Benjouad, vice-président en charge de la R&D de l’uir, préfèrent acheter une technologie existante plutôt que de risquer un investissement jugé hasardeux ». Pour ce professeur, l’État doit inciter d’avantage les industriels à soutenir la recherche. « si on créait un fond dédié uniquement à la R&D, mais destiné aux entreprises, ceci pourrait donner une nouvelle impulsion au secteur. Sans le privé, la R&D ne décollera pas », argumente Abdelaziz Benjouad. Même si elle n’a pas atteint les objectifs escomptés, l’« initiative maroc innovation » a quand même créé une dynamique. Selon les chiffres de l’office marocain de la propriété industrielle et Commerciale (OMPIC), l’évolution des dépôts de de- mandes de brevets d’invention d’origine marocaine, repartie selon les types de déposants, montre que d’année en année les dépôts émanant des centres de recherche marocains et des universités progressent de manière significative. Rien qu’en 2014, les brevets émanant des centres de recherche ont connu une hausse +28%, ceux des universités ont évolué de 14% par rapport à 2013. Autre grand problème, c’est le nombre de brevets que finissent par être exploités. Il n’y a pas de chiffre exacte, mais on pourrait facilement l’imaginer avoisinant le nul. Si la R&D au maroc connait une véritable dynamique, elle reste encore en décalage avec les besoins des industriels. En tout cas, Saïd Senhajjou, président du Cluster Ce3m, en semble convaincu. « Beaucoup de chercheurs au maroc veulent créer des procédés uniques, des inventions inédites. Or, nos industriels ne peuvent pas y investir car tout simplement ils ont d’autres priorités et d’autres besoins », affirme Saïd Benhajjou. Il se- rait judicieux, dit-il, de développer l’engineering afin d’offrir des solutions adaptés aux industriels. « L’innovation n’est pas seulement créer un produit révolutionnaire. Mais c’est surtout offrir une expertise, un savoir-faire qu’auparavant, les industriels n’arrivaient pas à avoir accès chez nous », renchérit-il. Depuis le lancement de la « stratégie Maroc innovation », il y a de plus en plus de porteurs de projets, souvent des jeunes entrepreneurs, qui assurent avoir un grand mal aujourd’hui à viabiliser leurs projets ou encore à en assurer les financements. L’État qui devait, selon les termes de sa stratégie, assurer, au moins en partie, ces financements, se seraient enlisé dans une gestion trop bureaucratique de ce chantier. En 2015, seules une petite cinquantaine de start-up innovantes ont pu bénéficier d’aides au financement et seulement 207 demandes de brevets ont été déposées auprès de l’office marocain de la propriété industrielle et commerciale propriété (OMPIC). Et si la clé était ailleurs…

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